Tout Comprendre Fev2019.pdf

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NATURE

SCIENCE

TECHNO

de glace

Génétique

RECORDS

les tempêtes

La révolution

CES CHANTIERS

ÉVÉNEMENT

la saison des

carnavals

10

EXPÉRIENCES QUI ONT

BOUS CULÉ

LA SCIENCE

N O 102 - Février 2019 Belgique : 6 € - Luxembourg/DOM : 6,60 € Suisse : 10 CHF - Tunisie : 7,60 TND - Maroc : 54 MAD Canada : 8,40 CAD - Liban : 16 000 LBP

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GAMME SCIENCE, INNOVATION & DÉCOUVERTE LA CURIOSITÉ EST UN JOLI DÉFAUT !

8-12 ANS MENSUEL

Réveille ta curiosité ! Des questions d’enfants, des réponses de spécialistes et de scientifiques.

DÈS 13 ANS MENSUEL

Connecteur de neurones Des chiffres, des infographies, des photos pour expliquer simplement des sujets pointus.

TRIMESTRIEL

Le plein de connaissances Un grand thème décliné en photos, infographies et dossiers sur 200 pages.

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ÉDITO Soyons curieux

Tout Comprendre

est édité par Fleurus Presse SAS au capital de 500 000 € Comité de direction : Emmanuel Mounier (Président et Directeur de la publication), Alexandrine de Charon (Directrice administrative et financière), Julien Beytout (Directeur commercial et Business Development), Juliette Salin (Directrice des rédactions) Rédaction : 2, villa de Lourcine 75014 Paris Rédactrice en chef : Karine Jacquet Secrétaire générale de rédaction : Clara Baudel Concepteur-graphiste : Denis Truchi Secrétaire de rédaction : Michelle Foucart-Orsel Iconographe : Béatrice Bon Ont collaboré à ce numéro : Marie Billon, François Bliss de la Boissière, Alice Bomboy, Marc Branchu, Florian Cadu, Denis Delbecq, Myriam Doghmi, Louna Esgueva, Gisèle Foucher, Delphine Gaston-Sloan, Patrick Gaumer, Cécile Guichon, Sophie Noucher, Maïa Wasserman Crédits couverture : Photos et illustrations : © Shutterstock ; Future Owns

© CERN-T.McCauley-L.Taylor ; Getty

Si l’homme est curieux par nature, les scientifiques le sont souvent davantage que le commun des mortels. Cette singularité les pousse à chercher, expérimenter, remettre en cause les connaissances séculaires pour explorer une nouvelle façon de penser. De leur travail naît – parfois – une découverte qui va révolutionner leur discipline, et plus généralement la science. Si Alexander Fleming n’avait pas découvert la pénicilline, une égratignure serait longtemps restée mortelle. Si Gregor Mendel n’avait pas joué les « Père Nature » avec des pois, les lois de l’hérédité n’auraient pas ouvert la voie à la génétique près d’un siècle avant la découverte de l’ADN. Et si Galilée n’avait pas étudié la chute des corps, la Nasa n’aurait pas emporté une plume et un marteau sur la Lune en 1971… Être curieux, c’est avoir envie de comprendre, alors lancezvous, osez être curieux et découvrez ces 10 expériences qui ont bousculé, en leur temps, la science. Karine Jacquet

Relations abonnés : Fleurus Presse - TSA 37505 - 59782 LILLE CEDEX 9 Tél. : 03 20 12 11 10, (lun-ven : 9 h 00 – 18 h 00) depuis l’étranger (33) 320 12 11 10 [email protected] Suisse : Edigroup, Tél. : 022 860 84 01 [email protected] Belgique : Edigroup, Tél. : 070 233 304 [email protected] Responsable des ventes directes : Thibaud Moussion Gestion des ventes au numéro : Réservé aux dépositaires et aux marchands de journaux : Destination Media, Tél. : 01 56 82 12 06 [email protected] Distribution : Presstalis Publicité : Unique Heritage Media Directrices de publicité : Nathalie Demougeot - Tél. : 01 56 79 36 53 Email : [email protected] Marie Cabuil - Tél. : 01 56 79 36 51 Email : [email protected]

Impression : Maury Imprimeur 74, route Nationale 45300 Manchecourt Conditionnement : BRC, ZI du Bois de l’Épine, 10 avenue du Front Populaire 91130 Ris-Orangis Commission paritaire : 0920 K 90540. Loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. ISSN : 2557-3306 Dépôt légal à parution Actionnaire : Unique Heritage Media

Ce magazine est édité sous licence de la société anglaise Future Publishing Limited. Tous les droits d’utilisation liés à la licence, incluant le nom How It Works appartiennent à Future Publishing Limited et ne peuvent être reproduits, en partie ou dans leur intégralité, sans consentement préalable écrit et délivré par Future Publishing Limited. © Future Publishing Limited. www.futureplc.com Comment ça marche est une marque déposée de Unique Heritage Media. Tout Comprendre est une marque déposée de Fleurus Heritage SA.

Fabrication : Créatoprint, 06 71 72 43 16

TOUT COMPRENDRE | 3

n°102

Février 2019

s o m m a i r e

DOSSIER

26 06

CLINS D’ŒIL

16

ÉVÉNEMENT : 4 CHOSES À SAVOIR SUR LE CARNAVAL

18

ACTUS SCIENCES & TECHNO

23

BD : LA RUBRIQUE SCIENTIFIQUE

24

SCIENCE EXPRESS : L’ACCRÉTION PLANÉTAIRE

Pourquoi les avaleurs sabres ne s’égorgent-ils pas ? : LES POURQUOI 21 BD de

Ce numéro comporte : - une offre de réabonnement - un encart Pièces Jaunes - une brochure LEC séjours linguistiques 2019

4 | TOUT COMPRENDRE

10

EXPÉRIENCES QUI ONT BOUSCULÉ LA SCIENCE

Février 2019

SCIENCES

38

ADN : LA RÉVOLUTION GÉNÉTIQUE

N AT U R E

n°102

TECHNO

62

CES CHANTIERS QUI BATTENT TOUS LES RECORDS

70

COMMENT ÇA MARCHE : UN SCANNER

48

LES TEMPÊTES DE GLACE

50

COMMENT SE FORME LA NEIGE ?

72

LES SECRETS DE LA TOUR DE LONDRES

52

ZOOM SUR LES GRÊLONS GÉANTS

80

ILS ONT MARQUÉ L’HISTOIRE : JEANNETTE GUYOT

E S PA C E

54

SAUVER LA TERRE DEPUIS L’ESPACE

et +

82

QUESTIONS / RÉPONSES

84 86 97

FRENCH TECH AGENDA QUIZ

© Getty ; Les Pourquoi, tome 2, de Philippe Vandel, Alan & Madd © Jungle / Kero, 2014 ; Shutterstock ; Thinkstock ; ESA ; Zaha Hadid Architects

HISTOIRE

TOUT COMPRENDRE | 5

CLINS D’ŒIL

Chine

Berlingots acidulés Dans le parc géologique national de Zhangye Danxia, dans la province de Gansu (centre-nord de la Chine), un paysage de montagnes escarpées offre aux yeux du spectateur, sur plus de 500  km2, d’étonnantes rayures multicolores, donnant à ces formations l’allure de gigantesques berlingots aux couleurs acidulées. À l’origine, les stries étaient horizontales, les différentes couches de sédiments (des grains de sable et de roche) s’étant superposées durant des millions d’années. Si ces strates arcen-ciel sont aujourd’hui exposées, c’est à cause de la tectonique des plaques (le mouvement des plaques qui constituent la « coque » externe rigide de la Terre), qui a plissé la croûte terrestre. Il y a environ 50  millions d’années, la plaque indienne a percuté la plaque eurasienne, donnant naissance à la chaîne de l’Himalaya. Le sol déformé à divers endroits a dévoilé les différentes couches rocheuses. Les phénomènes climatiques (vent, pluie, gel…) ont ensuite sculpté peu à peu les reliefs. Quant aux couleurs, elles sont dues à la composition minérale des différentes accumulations de sédiments, et à leur oxydation au contact de l’air. Par exemple, la teinte cuivre brûlé, l’une des plus répandues dans ce  paysage, est due au fer qui réagit avec l’oxygène de l’air, de la même façon que le métal rouille. K.J.

6 | TOUT COMPRENDRE

© Shutterstock

TOUT COMPRENDRE | 7

CLINS D’ŒIL

8 | TOUT COMPRENDRE

Arctique

Même pas froid

© Getty

Ne vous y trompez pas. Bien qu’il semble transi de froid, ce renard arctique est capable de supporter des températures de – 70 °C sans le moindre frisson. Son secret ? Sa fourrure. Très épaisse, cette couverture de poils (qui passe du marron clair au blanc au gré des saisons) est étonnamment isolante. Elle recouvre toutes les parties du corps de l’animal, y compris les coussinets sous ses pattes. Sa queue touffue, longue d’une trentaine de centimètres, complète cette armure en lui servant de  couverture. Pour limiter les déperditions de chaleur, ce renard est doté d’un museau et d’oreilles plus courts que les autres renards. Des adaptations thermiques qui lui permettent d’errer sur la banquise et  dans la toundra à la recherche de ses  proies favorites : les lemmings. K.J.

TOUT COMPRENDRE | 9

CLINS D’ŒIL

Suède

Palais de glace C’est une tradition depuis 1990. Chaque année, à  l’automne, la ville de Jukkasjärvi, située à  200  km au nord du cercle polaire, se dote d’un établissement éphémère : l’Ice Hotel. Comme son nom l’indique, cette structure est faite entièrement de glace et de neige. Outre le côté féerique de cet écrin baigné par la lumière naturelle traversant les blocs translucides, l’hôtel est avant tout une œuvre d’art qui évolue, année après année, au gré des projets des 40  sculpteurs qui le façonnent. Au total, pas moins de 10 000  t de glace, prélevées dans le fleuve Torne, et plus de 30 000  t de « snice » (un  mélange de neige et de glace) sont nécessaires pour la construction de ce palais de 5 500  m2. À l’origine, ce bâtiment givré, beaucoup plus modeste, accueillait un stage de sculpture sur glace. Mais le succès croissant de  cette initiative a rapidement dépassé les capacités d’hébergement de la ville. D’où l’idée de certains de dormir dans le hall. Le concept de l’Ice Hotel était né. Aujourd’hui, quelque 55 000  touristes, peu frileux, viennent entre décembre et avril dormir à la fraîche (– 5 °C) dans l’une des 65  chambres de l’établissement. K.J.

10 | TOUT COMPRENDRE

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© Getty

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CLINS D’ŒIL

12 | TOUT COMPRENDRE

Madagascar

Les rois de la piste de danse les arbres, bondissant de branche en  branche, ces lémuriens descendent parfois sur la terre ferme. Loin d’être aussi agiles que dans les airs, les sifakas se déplacent en bande, sautillant sur leurs deux pattes arrière tandis que leurs membres antérieurs gesticulent dans tous les  sens. Une chorégraphie cocasse mais efficace, qui a fait la réputation de cette espèce aujourd’hui menacée  d’extinction. K.J.

© Getty

Ceux qui ont vu les films d’animation Madagascar se souviennent peutêtre de Julian, le truculent roi des lémuriens, grand amateur de danse. Ce personnage haut en couleur a  sans doute été inspiré des sifakas, des  lémuriens malgaches (Propithecus verreauxi) surnommés les lémuriens danseurs. Un sobriquet que ces petits primates (40  cm pour 3,5  kg) doivent à leurs déplacements au sol. S’ils vivent essentiellement dans

TOUT COMPRENDRE | 13

CLINS D’ŒIL

Espace

Illuminations galactiques Inutile de scruter le ciel avec votre télescope amateur, vous ne le verrez jamais ainsi. Cette image est celle d’une zone de la galaxie naine du Fourneau, située à plus de 500 000  annéeslumière de nous. Invisible à l’œil nu, elle ne laisse voir d’elle que le noir intersidéral. Du moins en apparence. Car récemment, l’unité  4 du Very Large Telescope (VLT), installé au Chili et constitué de quatre gigantesques télescopes, est parvenue à reconstituer une photographie du champ ultra-profond de Hubble, un endroit de l’Univers où se trouvent les astres les plus lointains. Cette prouesse a été possible grâce à un spectrographe de champ intégral, baptisé Muse et capable d’observer l’intégralité du spectre lumineux des astres, tant dans le visible que dans l’infrarouge. Au-delà de l’exploit technique, c’est surtout ce que Muse a révélé qui a sidéré les astrophysiciens. En  effet, en remontant l’espace et le temps sur 13  milliards d’années-lumière, Muse a livré une  partie de l’histoire de la genèse de l’Univers, dévoilant que de minces nuages d’hydrogène atomique (le  premier élément constitutif de l’Univers, ici  de couleur bleue) enveloppent, tel un cocon, les premières galaxies. K.J.

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© ESA / Hubble / Nasa / ESO / Lutz Wisotzki

ACTUS

événement

4 choses à savoir sur

Le carnaval Nice, Venise, Rio… Les images des défilés s’affichent ces jours-ci dans les médias du monde entier. Partout, la saison des carnavals bat son plein ! On se déguise, on parade, on danse, on se moque des puissants… Un rite de défoulement populaire vieux de plusieurs millénaires déjà. Par Marc Branchu

Une année de carnavals 6  janvier / 5  mars : La Nouvelle-Orléans (États-Unis) Le plus… jazzy. Le plus important carnaval des États-Unis a lieu chaque année dans la « ville du jazz ». Il culmine lors de la parade du Mardi gras.

16 | TOUT COMPRENDRE

2 février / 23  mars : Dunkerque (France)

Le plus… joyeux. Les trois journées « Joyeuses » (jusqu’au Mardi gras) sont le point d’orgue d’un carnaval issu du passé maritime de la ville (voir encadré Actu).

8 / 17  février : Québec (Canada)

Le plus… givré, avec parfois – 15 °C au thermomètre ! Au programme : défilés en moonboots, course de canots sur le Saint-Laurent ou sculptures sur glace.

16 / 28  février : Nice (France)

Le plus… imposant, avec ses immenses défilés de chars fleuris, escortés de leurs géants de cartonpâte. C’est le plus important carnaval de France.

23  février / 5  mars : Venise (Italie)

Le plus… raffiné, avec ses costumes et ses bals somptueux. Il s’ouvre par le « vol de l’Ange » : une jeune fille survole la place SaintMarc, suspendue à un filin.

Fête du désordre, le carnaval trouverait son origine dans les « Sacées », célébrées voici plus de 4 000 ans dans l’ancienne Babylone (actuel Irak). Pendant cinq jours en été, l’ordre hiérarchique était bouleversé : les serviteurs commandaient les maîtres, et un condamné à mort prenait même la place du roi. Il portait ses vêtements, s’exhibait sur son trône, honorait ses épouses… avant d’être exécuté au soir du cinquième jour ! Des rites de défoulement similaires furent adoptés par d’autres civilisations lors du solstice d’hiver. Une façon de libérer les tensions et de régénérer la société avant la nouvelle année. Comme chez les Romains, où l’on défilait déguisé pendant les Saturnales (fin décembre).

de Paris était jadis le plus célèbre 4 Celui Un carnaval en France ? On pense à Nice ou Dunkerque, pas à Paris. Et pourtant, les romans, les peintures, les films – tel Les Enfants du paradis, de Marcel Carné (1945) – montrent combien la capitale savait s’amuser ! Comme partout au Moyen Âge, il y eut d’abord la « Fête des fous » : les trois jours suivant Noël, la folie s’emparait notamment des religieux, qui se déguisaient, dansaient dans leurs églises, jouaient aux dés ! Interdit au XVe siècle, ce rite fut remplacé par le carnaval, arrivé à son apogée au XIXe siècle. La fête culminait lors de la « promenade du bœuf gras » dans les rues de Paris. Plus que celui de Venise, le carnaval de Paris devint la référence, celui qui lançait les modes, comme le lâcher de confettis (1891) et de serpentins (1892). Quasi disparu en 1945, il renaît depuis 1993. Cette année, il aura lieu le 3 mars.

28  février / 6  mars : Cologne (Allemagne)

Le plus… cravaté. Du moins, jusqu’à ce que les femmes, lors du défilé d’ouverture, coupent la cravate de tous les hommes rencontrés !

2 / 5  mars : Barranquilla (Colombie)

2

l’église l’inscrivit au calendrier

L’Église chrétienne naissante condamna ces rites païens (non religieux). Elle s’éleva aussi contre l’usage du masque, considéré comme une grave atteinte au créateur, « car l’homme a été fait à la ressemblance de Dieu ». Sousentendu : modifier l’apparence de son visage est un sacrilège. Elle tenta donc à plusieurs reprises d’interdire les défilés masqués. En vain : les populations restaient attachées à ces traditions libératrices. Impuissante, l’Église décida alors de circonscrire ces rites, en les inscrivant dans le calendrier liturgique. Ainsi apparurent les festivités de Noël au IVe siècle (pour « couvrir » les Saturnales de décembre) et, un peu plus tard, le carnaval, en lieu et place des festivités de fin d’hiver.

3

Son étymologie serait liée à… la viande

Au Moyen Âge, le carnaval entra dans les mœurs de l’Europe chrétienne. Il devint cette période où l’on festoie avant le Carême, jeûne de quarante jours en hommage à Jésus-Christ (qui aurait lui-même jeûné quarante jours dans le désert). Avant cela, tous les excès sont permis, y compris dans l’assiette ! Surtout le Mardi gras, dernier jour du carnaval, ce moment où l’on s’apprête donc à manger « maigre » : limiter ses repas, supprimer viande et graisses animales. Autrement dit carne levare, « retirer la chair » en latin. Expression qui aurait donné le nom carnaval. Mais certains pensent que le mot serait plutôt dérivé de carrus navalis, en référence au char naval (présent de longue date dans les défilés).

Dunkerque, trois mois de chahuts ! Du 2 février au 23 mars, Dunkerque est en effervescence, avec en point d’orgue les trois journées « Joyeuses » du carnaval, qui mènent à l’apothéose du Mardi gras, le 5 mars. En réalité, la ville nordiste vibre trois mois durant, les  festivités débordant allègrement du cadre officiel ! Non pas au rythme des défilés de chars, comme à Rio ou Nice, mais à celui des « bandes » et des bals. Déguisés, les  milliers de « carnavaleux » marchent en chantant, menés par les bandes locales qui organisent les  cortèges. On forme des « chahuts » (on se serre les coudes, quitte à ne plus toucher terre !) et

Le plus… métissé. Troisième carnaval au monde (après Rio et Venise), Baranquilla célèbre le métissage des cultures amérindienne, africaine et européenne.

2 / 9  mars : Rio de Janeiro (Brésil)

Le plus… célèbre. Carnaval ultra-populaire, il s’achève le Mardi gras en apothéose sur le « sambodrome », une avenue dédiée au défilé final des écoles de samba.

on se restaure dans les « chapelles » (domiciles que les habitants ouvrent aux carnavaleux). Un carnaval hyperchaleureux, issu des fêtes que les armateurs organisaient au  XVIIIe  siècle au profit des marins, avant que ceux-ci cinglent vers l’Islande pour pêcher le hareng.

3 / 5  mars : Binche (Belgique)

Le plus… « gillesque ». Classé au patrimoine oral et immatériel de l’Unesco, il est marqué par la parade des Gilles, personnages costumés aux origines mystérieuses.

© Shutterstock - Ville de Dunkerque.

1

il a des origines Babyloniennes

24 / 26  août : Notting Hill (Grande-Bretagne)

Le plus… British (bien que créé en fait par des immigrants caribéens). Il se déroule tous les étés depuis 1966 dans ce quartier du nord-est de Londres.

TOUT COMPRENDRE | 17

ACTUS

Astrophysique

La station spatiale chinoise se dévoile Grand événement au dernier Salon d’aéronautique et d’aérospatiale de Zhuhai, en  Chine, en novembre dernier : l’empire du Milieu a présenté une maquette à taille réelle de sa future station spatiale, dont la  construction devrait démarrer en 2020 et  s’achever vers 2022. Cette structure est censée succéder à la Station spatiale internationale (ISS), qui sera abandonnée en  2024, après vingt-cinq années de service. Baptisé Tiangong  3 (« Palais céleste »), l’engin  de 60  t se composera de trois parties : un module de vie de 17  m de longueur (photo) et deux modules d’expérimentations. À terme, il deviendra probablement le seul bâtiment habité de l’espace et pourra accueillir de trois à six astronautes à son bord. Tout comme l’ISS, il servira de plateforme pour réaliser des travaux scientifiques. Durée de vie prévue pour  l’ensemble : dix ans minimum. 18 | TOUT COMPRENDRE

sciences & Techno

d’actus

VIANDE ARTIFICIELLE EN VENTE Manger de la viande sans tuer d’animaux va bientôt devenir possible. Du moins d’un point de vue légal. L’administration américaine vient de préciser le cadre réglementaire dans lequel la viande artificielle conçue à partir de cellules animales pourra désormais être vendue aux États-Unis. Reste aux laboratoires à réussir à la produire à bas coût, ce qui n’est pas encore une évidence.

DU SOLEIL MÊME LA NUIT Pour réaliser des économies d’énergie, la Chine envisage d’envoyer à partir de 2020 des satellites en orbite capables de  réfléchir la lumière du Soleil vers la Terre durant la nuit. Une manière étonnante de se passer de l’éclairage urbain classique, mais qui n’a pas encore fait ses preuves et pourrait poser des problèmes de pollution lumineuse. Projet à suivre…

Paléontologie

Un escargot retrouvé prisonnier depuis 99 millions d’années Cette coquille piégée dans de l’ambre (résine fossilisée) est celle d’un escargot qui vivait au Crétacé… c’est-à-dire il y a 99  millions d’années, d’après les estimations des chercheurs de l’université Monash, en Australie, qui l’ont mis au jour. Ce n’est pas la première fois que des animaux très anciens sont retrouvés fossilisés dans de l’ambre, mais cette fois, le résultat est spectaculaire car l’espèce est ancienne et extrêmement bien conservée, y compris dans ses

parties molles : tête et pied y sont encore présents, ce qui est une première. L’échantillon est minuscule (5  mm de diamètre pour la coquille), ce  qui n’a pas facilité son étude, mais les scientifiques ont tout de même émis une hypothèse : le corps serait resté intact car l’escargot aurait chuté dans  de  la résine où, piégé, il n’aurait pas eu  le temps de se rétracter. De quoi en apprendre plus sur les spécimens qui vivaient sur Terre à cette époque-là, contemporains des dinosaures !

PREMIERS ÉCRANS PLIABLES Cela faisait des années que les constructeurs promettaient l’arrivée de supports flexibles, qui pourraient se plier et se déplier pour bien se transporter dans nos poches. Enfin, on  y est : l’entreprise chinoise Royole a  annoncé l’arrivée d’un premier modèle commercialisé qui peut donc servir de tablette ou de smartphone, en fonction du pliage choisi !

© Shan he / Imaginechina ; 2018 Elsevier Ltd. All rights reserved ; David Parry / PA Wire

DIX ANS DE MOINS En Inde, dans la ville très polluée de New Delhi, des chercheurs ont estimé que les habitants perdaient en moyenne dix ans d’espérance de vie, comparée à celle des habitants de villes à l’atmosphère plus saine. En France, cette différence avoisine les deux ans dans les villes les plus polluées.

TOUT COMPRENDRE | 19

ACTUS

Imagerie médicale

Ce scanner produit des images en 3D du corps entier C’est un véritable exploit technique en  matière d’imagerie médicale. Pour la  première fois, une équipe a mis au point un scanner capable de capturer une image 3D de l’ensemble du corps humain en une seule fois. Là où en temps normal, l’appareil extrait des clichés organe par organe (lire aussi pp. 70-71), il réussit ici à reconstruire le corps entier en seulement

trente secondes. « Notre plus grand  défi a été d’équiper le scanner de dix fois plus de capteurs et de parvenir à traiter l’énorme quantité de données générées », explique Simon Cherry, qui a participé aux travaux à l’université de Californie. Les images sont étonnantes et les retombées, importantes. « Nous comptons démarrer des études de patients dans le  courant de cette année. Les premières

applications cliniques concerneront l’étude de cancers et l’imagerie cardiaque », poursuit le chercheur. Grâce à ces clichés, les scientifiques espèrent réaliser de meilleurs suivis médicaux et améliorer les futurs diagnostics en bénéficiant d’une vraie vision de l’ensemble des organes.

Un cratère géant détecté sous la glace au Groenland Trente et un  kilomètres de diamètre et 320  m de profondeur… Ce sont les dimensions du trou monstrueux qui a été repéré au  Groenland sous 1  km de glace par une équipe internationale de chercheurs, grâce à des images radar. Sa  taille pourrait engloutir la ville de Paris. Comment s’est-il formé ? Et à quelle époque ? Impossible de trancher pour l’instant. D’ores et déjà, il se situerait parmi les 25 plus grands cratères terrestres en termes de  taille. Pour les scientifiques, il pourrait s’agir d’un impact lié  à  la  chute d’une météorite, mais il est encore trop tôt  pour pouvoir l’affirmer avec certitude. Des recherches sont en cours pour essayer de le dater et  de déterminer par des prélèvements la nature des roches à l’intérieur et autour. Selon les chercheurs, il est possible que le trou se soit formé il y a 12  000  ans seulement. Une époque relativement récente puisqu’elle correspond quasiment au début du Néolithique et à  la  sédentarisation de l’homme ! 20 | TOUT COMPRENDRE

Altitude

Kilomètres

© University of California / Davis ; Zhongshan Hospital, Shanghai ; Nasa ; Alfred Wegener Institute

Géologie

Les Pourquoi, tome 2, de Philippe Vandel, Alan & Madd © Jungle/Kero, 2014

Pourquoi les avaleurs de sabres ne s’égorgent-ils pas ?

TOUT COMPRENDRE | 21

ACTUS

Paléoanthropologie

Plus de 40 000 ans : c’est l’âge, estimé par des chercheurs australiens et indonésiens, d’une fresque retrouvée parmi d’autres dans une grotte de Bornéo (Asie du Sud-Est). Elle aurait donc été peinte 25 000 ans plus tôt que celles de Lascaux (Dordogne), et quelques milliers d’années avant les animaux de la grotte Chauvet-Pont d’Arc (Ardèche). Cette fresque, l’une des plus vieilles peintures figuratives retrouvées

dans le monde à ce jour, représente un animal de type bovidé dont l’espèce reste difficile à  déterminer. La grotte avait déjà été repérée dans les années 1990, mais les  fresques n’avaient pas pu être datées. Cette découverte est d’autant plus rare que la plupart des vieilles grottes ornées connues se situaient jusqu’ici en Europe.

Pour mémoire, une autre trouvaille a  marqué les esprits récemment quand des  chercheurs ont mis au jour un dessin datant de 73 000 ans sur un caillou en  Afrique du Sud. Mais cette fois-là, il  s’agissait d’art non figuratif.

Aéronautique

Un avion à propulsion ionique a volé pour la première fois Cet avion paraît tout simple. Sa structure de 5  m de largeur n’est pas forcément spectaculaire. Et pourtant… Il s’agit du tout premier modèle capable de voler sans pièce mobile embarquée. Autrement dit, ni hélice, ni turbine, ni moteur, ni ventilateur. Cet engin a simplement été propulsé par un « vent ionique », c’est-à-dire un flux d’ions généré à bord de l’avion. Ce principe est dit électro-aérodynamique : lorsqu’un courant passe entre deux électrodes, l’air entre les électrodes produit une poussée. En partant de cette idée, des ingénieurs du MIT (États-Unis) ont mené un premier test sommaire : un vol de 55  m pendant une dizaine de secondes. Et ça marche ! Les  avantages : l’avion n’a pas besoin

22 | TOUT COMPRENDRE

d’énergie fossile pour voler, et n’émet pas de bruit. « Ce  test a ouvert de nouvelles possibilités inexplorées pour des aéronefs plus silencieux, plus simples mécaniquement et sans émission de combustion », commente Steven Barrett, professeur au MIT. Des drones, voire des avions hybrides, pourraient à l’avenir utiliser cette source ionique couplée à des systèmes plus classiques de combustion pour réduire leur  consommation de carburant et la  pollution qu’ils émettent. Prometteur !

© Shutterstock ; 2018 Anadolu Agency / AFP ; MIT

L’art rupestre prend un nouveau coup de vieux

PAVLOVOLOGIE

La Rubrique scientifique tome 1 par Boulet © Editions Glénat, 2002

La rubrique scientifique : PAVLOVOLOGIE

TOUT COMPRENDRE | 23

SCIENCE EXPRESS

l’accrétion planétaire Comment se forment les planètes rocheuses Contexte Lorsque des éléments tels que l’hydrogène, l’hélium et d’autres gaz ionisés se combinent avec la poussière spatiale, ils forment un nuage interstellaire qui finit par s’effondrer sous sa propre masse. La poussière et les gaz sont entraînés au centre de ce nuage par les forces gravitationnelles. Le cœur du nuage devient très chaud et dense et forme une nouvelle étoile. Autour d’elle, le nuage s’effondre à son tour, générant un disque de matériaux en rotation. C’est à partir de ce « disque protoplanétaire » que naissent les planètes.

En bref Le cataclysme cosmique qui donne naissance à une nouvelle étoile s’accompagne, sous l’effet de la gravité, de la formation d’un disque autour de l’astre, constitué de gaz et de poussières en rotation. Au fil du temps, de petits morceaux de poussière se combinent et créent des amas de matière, tout en continuant à orbiter autour de l’étoile. Ces amas, des météorites chondritiques, attirent le matériau environnant et grossissent encore. Sous la force de la gravité, ces particules se heurtent les unes aux autres pour former les prémices d’une planète, un planétésimal. Ce dernier, en orbite autour de l’étoile, continue de croître, pour finalement devenir un embryon de planète : une protoplanète.

À RETENIR De minuscules particules de poussière dans les disques protoplanétaires entrent en collision et s’agglomèrent. Ces amas continuent à s’accumuler jusqu’à devenir des planètes.

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1

2 3 4

1 Nébuleuse

Un gigantesque nuage interstellaire (une nébuleuse) s’effondre sur lui-même. Ce cataclysme donne naissance à une étoile entourée d’un immense nuage constitué de gaz et de poussières cosmiques qui prend la forme d’un disque.

2 Chondrites

Les poussières et minéraux en orbite autour de l’étoile nouvellement née s’agglomèrent et forment des corps célestes, nommés météorites chondritiques.

3 Planétésimal

Les météorites s’attirent sous l’action des forces gravitationnelles et s’agrègent. Cette accumulation de matière engendre la formation d’un planétésimal de la taille d’un astéroïde.

4 Protoplanète

Devenus suffisamment massifs, les éléments les plus lourds du planétésimal plongent vers le centre sous l’effet de la gravitation. Les couches principales de la structure de la future planète se forment. La protoplanète est alors recouverte d’un vaste océan de lave.

TOUT COMPRENDRE | 25

© Getty ; Adrian Mann ; Detlev van Ravenswaay

DO SS I E R

10

EXPÉRIENCES QUI ONT

BOU SC ULÉ

LA SCIENCE

26 | TOUT COMPRENDRE

Quel est le point commun entre la pénicilline, le boson de Higgs, les lois de l’hérédité, l’organisation d’un hôpital et un téléphone sans fil ? Toutes ces avancées et bien d’autres sont nées d’expériences – parfois hasardeuses – qui ont, en leur temps, révolutionné la science. . . et changé notre monde. Mais comment les scientifiques à l’origine de ces découvertes ont-ils procédé ? Que voulaient-ils prouver ? Et d’ailleurs, cherchaient-ils vraiment ce qu’ils ont trouvé ? Les réponses avec ces 10 expériences. . . renversantes !

© Shutterstock ; Future Owns

Par Karine Jacquet et Alice Bomboy

TOUT COMPRENDRE | 27

DOSSIER

1798

1

Cavendish pèse la terre

Q

uand on emploie le terme de pesée, on pense aussitôt à une balance. Bien évidemment, il est impossible de peser un astre comme la Terre, ce qui n’empêche toutefois pas de déterminer sa masse. Dans le langage courant, on ne fait pas la distinction entre le poids et la masse d’un objet. Ces deux notions indiquent pourtant des grandeurs différentes. La masse mesure la quantité de matière (atomes, molécules) contenue dans un objet et s’exprime en kilogrammes. Quel que soit l’endroit où l’objet se trouve dans l’Univers, sa masse est donc toujours la même. Ce qui n’est pas le cas de son poids (exprimé en newtons, N), qui évalue la force d’attraction (notée g) qu’exerce un astre sur un objet. Or, cette force est d’autant plus grande que l’astre a une masse élevée. Le poids dépend donc de l’endroit où se trouve l’objet et de sa masse. Ce qui explique que sur Terre, où g est six fois plus grande que sur la Lune (moins massive que notre planète), une personne pèse six fois plus que sur notre satellite.

de près de 2 m, légère et renforcée par un fil d’argent formant un triangle. Ce fléau est suspendu horizontalement en son milieu par un fil de torsion de 1 m, en cuivre argenté, maintenu à l’extrémité d’un support horizontal solidement fixé au mur. À chaque extrémité du fléau est suspendue une petite sphère de plomb de 5 cm de diamètre et pesant 730 g. Ce dispositif forme un pendule de torsion. Au centre, il fixe un petit miroir, parallèle au fléau. En éclairant le miroir avec une source de lumière, le rayon se réfléchit sur une règle, située à 5 m du miroir. Ainsi, si le pendule oscille, le point lumineux réfléchi sur la règle se déplace, ce qui permet à Cavendish de déterminer l’angle avec lequel le pendule a tourné. Ce système est si sensible que le physicien doit le confiner dans une

La balance de cavendish

Mais revenons à l’expérience d’Henry Cavendish (1731-1810). Installé dans sa cave, ce physicien britannique, à la fois solitaire et excentrique, entend bien déterminer la masse de la Terre par un moyen astronomique. Ce qui est à l’époque une grande préoccupation scientifique. En effet, en 1618, l’astronome allemand Johannes Kepler a établi que la période de révolution d’une planète dépend de sa distance au Soleil et de la masse de celui-ci, et non de celle de la planète. En 1687, la loi de l’interaction gravitationnelle publiée par Isaac Newton postule, elle, que la force d’attraction entre deux corps suit le produit de leurs masses et est inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare. Fort de ces deux lois, Cavendish tente une ambitieuse expérimentation. Il s’équipe d’une balance de torsion, constituée d’une barre de bois longue

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Fil de torsion Pivot Miroir

PENDULE.

boîte en acajou pour le protéger de toute perturbation (courant d’air, variation de température…). À l’extérieur de la boîte, le chercheur dispose deux grandes sphères en plomb de 30 cm de diamètre et 158 kg chacune,

m

M

m

M

Règle

Source de lumière

vers 900

2

Rhazès plante les bases de l’organisation hospitalière

Le médecin iranien aurait eu l’idée d’observer la décomposition de morceaux de viande dans divers endroits de Bagdad pour trouver la zone la plus saine où bâtir un hôpital.

GRAVITATION.

Le physicien dispose de toutes les valeurs pour déterminer la masse de la Terre, puisque ces mesures viennent de lui permettre de calculer G, à savoir la constante de gravitation. Son calcul livre une valeur de G égale à 6,6.10–11 m3/kg/s, soit une erreur très infime au regard de la véritable valeur déterminée depuis : 6,67.10–11 m3/kg/s. Connaissant le rayon de la Terre Rt, la valeur de l’accélération de la pesanteur g à la surface de la Terre et la constante universelle de gravitation G, Cavendish applique la formule Mt (masse de la Terre) = g(Rt2/G) et obtient une masse égale à 5,98.1024 kg. Aujourd’hui, on sait qu’elle est de 5,97.1024 kg, soit près de 6 millions de milliards de milliards de kilogrammes…

L

e nom de Mohammad Ibn Zakariya Râzi, plus connu en Occident sous le patronyme de Rhazès ou Al-Razi, ne vous dit sans doute rien. Et pourtant, pour beaucoup d’historiens, il est le plus éminent médecin du Moyen Âge. Rhazès naît en 865 à Ray, à quelques kilomètres au sud de Téhéran (actuel Iran). Il étudie la philosophie, les mathématiques, l’astronomie, l’alchimie et la musique avant de se tourner, à plus de 30 ans, vers la médecine. Auteur de près de 200 livres, ce médecin iranien aux multiples talents (chirurgie, gynécologie, obstétrique, ophtalmologie, stomatologie…) est surtout connu pour la qualité de ses observations cliniques et ses innovations thérapeutiques. C’est lui qui pose les fondements de la médecine moderne grâce à ses expérimentations (il teste ses nouveaux traitements sur des animaux) et aux déductions qu’il en tire. Il est le premier à utiliser du coton pour arrêter les saignements d’une plaie ou, lors d’opérations chirurgicales, à suturer avec de la corde à harpe et

du crin de cheval. C’est aussi lui qui instaure un interrogatoire minutieux du malade et la recherche des symptômes avant de poser un diagnostic et de délivrer un traitement, ou encore le compte rendu journalier pour les patients hospitaliers. Une approche novatrice pour la médecine de l’époque, influencée par les dogmes des médecins grecs comme Hippocrate (460-377 av. J.-C.) ou Galien (129-216).

VIANDE.

L’un de ses apports les plus importants reste toutefois la mise en place de la première organisation hospitalière. L’histoire raconte que Rhazès fut chargé par le calife Al-Muktafi de déterminer le meilleur emplacement pour y faire construire l’hôpital central de Bagdad. Le médecin aurait eu l’idée de suspendre des morceaux de viande dans divers lieux de la ville. Quelques jours plus tard, il aurait observé l’état des chairs et choisi l’endroit où la viande s’était décomposée le moins vite, en ayant déduit que c’était la zone la plus saine.

© Illustrations : Ed Crooks ; Alamy

suspendues à un système en bois et en cuivre et situées à 22,5 cm de distance des petites sphères, créant ainsi une force d’attraction gravitationnelle entre les deux types de sphères. Cette force tord la tige : les petites sphères s’approchent des plus grosses jusqu’à ce que la torsion du fil équilibre le couple gravitationnel. Cavendish constate alors que le faisceau lumineux est décalé de 8,7 mm par rapport à sa position initiale, soit une déviation d’un angle de 0,053°.

TOUT COMPRENDRE | 29

DOSSIER

1597

4

Galilée théorise la chute des corps

D

1928

3

Fleming découvre accidentellement la pénicilline

L

es vacances ont généralement du bon… même pour la science. Médecin et pharmacologue d’origine écossaise, Alexander Fleming (18811955) travaille dans un laboratoire de l’hôpital St Mary, à Londres, où il enseigne la bactériologie. Il y étudie les staphylocoques, des bactéries responsables d’infections mortelles comme la tuberculose et la syphilis. En août 1928, le chercheur part en vacances deux semaines. À son retour, le 3 septembre, il constate la présence de moisissures verdâtres dans les boîtes de culture de ses bactéries oubliées sur la paillasse. Celles-ci ont été contaminées par un champignon microscopique, Penicillium notatum, sur lequel son voisin travaille. Alors qu’il s’apprête à décontaminer ses boîtes, Fleming remarque la présence d’une zone circulaire autour des moisissures, où le staphylocoque n’a pas proliféré.

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Le scientifique pressent que le champignon a sécrété une substance antibactérienne, qu’il baptise pénicilline. Sa découverte ne suscite guère l’intérêt, car isoler la pénicilline et la purifier reste une gageure.

ANTIBIOTIQUES.

Mais à la fin des années 1930, le pharmacologue australien Howard Florey et le biochimiste allemand Ernst Boris Chain parviennent à isoler la pénicilline à partir d’une autre souche de champignon, Penicillium chrysogenum, qui en produit 200 fois plus que Penicillium notatum ! Dès 1941, la pénicilline est fabriquée à l’échelle industrielle. La première famille d’antibiotiques voit le jour. Une découverte qui vaut à Fleming d’être anobli et récompensé en 1945 par le prix Nobel de physiologie-médecine, partagé avec Florey et Chain.

e Galilée – de son vrai nom Galileo Galilei (1564-1642) –, on connaît surtout la célèbre formule « Et pourtant, elle [la Terre] tourne [autour du Soleil] ». Cette phrase aurait été murmurée le 22 juin 1633, alors que le savant italien vient de renier sa thèse de l’héliocentrisme (prônant que le Soleil est le centre de l’Univers) pour échapper au bûcher de l’Inquisition. Le vieil homme, alors âgé de 69 ans, est l’un des plus brillants scientifiques de son époque : il est à la fois mathématicien, physicien et astronome. Dès 1597, il a eu l’intuition que le poids d’un objet n’a pas d’influence sur sa vitesse de chute (si on néglige les forces de frottement). Une théorie révolutionnaire pour l’époque, puisqu’elle rejette les fondements de la physique posés dès l’Antiquité par le philosophe grec Aristote (384-322 av. J.-C.).

PLUME.

Selon la légende, Galilée aurait testé lui-même sa théorie depuis le sommet de la tour de Pise, sa ville natale : il lâche du haut des 54 m de la tour plusieurs objets de poids différents mais de volumes comparables (boulets de canon, balles de mousquet, billes de bois, pièces d’or ou d’argent). Grâce à l’invention du chronomètre, Galilée constate que tous les objets mettent le même temps à s’écraser sur le sol. Conclusion : quelle que soit leur masse ou leur composition, la gravité accélère tous les objets de la même façon. Pour peu que l’on néglige les forces

L’expérience de la tour de pise 1. Boulets de canon

Galilée prend deux boulets de canon de poids différents mais de volumes similaires pour avoir des surfaces de frottement équivalentes.

2. Début de la course

Il laisse tomber les deux objets depuis la même hauteur, exactement au même moment.

3. Accélération

Bien qu’ils aient des masses différentes, les boulets de canon tombent à une vitesse très similaire.

4. Ligne d’arrivée

Les deux boulets touchent le sol presque en même temps : la différence, due à la résistance de l’air, est bien inférieure à celle prédite par la théorie d’Aristote.

de frottement : il est évident que si on lâche simultanément une plume d’oiseau et une boule de plomb du haut d’une tour, la vitesse de chute de la plume sera ralentie par les forces de frottement avec l’air. Le scientifique italien ne peut donner d’explication à ses observations. Il faudra attendre 1915 et Einstein pour parler de « l’universalité de la chute libre », ou plus simplement du « principe d’équivalence »,

qui suggère que la force d’inertie (celle qui met en mouvement un objet) est de même nature que la force de gravitation. Galilée passe les dernières années de sa vie emprisonné, mais ses travaux sur la vitesse, la gravitation et la chute libre jetteront les bases de la compréhension du mouvement des planètes et du Système solaire.

© Illustrations : Ed Crooks ; Alamy ; Nasa

En 1971, les astronautes de la mission Apollo 15 reproduisent l’expérimentation de Galilée sur la Lune. Le commandant David Scott lâche une plume de faucon et un marteau. Dans le quasi-vide lunaire, les deux objets chutent à la même vitesse et touchent en même temps le sol de notre satellite.

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DOSSIER

1942

5

Fermi fabrique la première pile atomique

À

la fin de l’année 1938, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, la course à l’armement est devenue une priorité pour de nombreux pays. Le président des États-Unis, Franklin D. Roosevelt, engage un programme top secret, baptisé Manhattan. Son but : fabriquer le plus rapidement possible une bombe atomique. À l’époque, la fission nucléaire vient d’être découverte. Ce procédé consiste à casser un atome d’uranium (très lourd) en deux noyaux plus légers sous l’impact d’un neutron (une particule n’ayant pas de charge électrique). Cette fission nucléaire génère une grande quantité d’énergie et libère deux ou trois neutrons qui peuvent à leur tour casser d’autres noyaux, dégager de l’énergie et libérer d’autres neutrons, créant ainsi une réaction en chaîne. En 1942, Enrico Fermi (1901-1954), un physicien italien émigré aux États-Unis, dirige une équipe dont les recherches portent sur les techniques permettant de ralentir la vitesse des neutrons, afin de contrôler la réaction en chaîne

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générée par la fission nucléaire. Le 2 décembre, Fermi et ses collègues contemplent leur création. Dissimulés dans une salle de squash abandonnée sous les gradins d’un stade de football américain de l’université de Chicago, ils ont construit une gigantesque pile atomique. Neutron Celle-ci se compose d’un empilement de dizaines de couches de blocs de graphite Atome pur (un minéral de carbone), d’uranium d’oxyde d’uranium et d’uranium métal inséré au cœur de la pile.

CADMIUM. En différents points de la structure, les chercheurs ont inséré des barres commandes enrobées de cadmium. Leur rôle ? Tout comme le graphite, le cadmium est un matériau qui peut absorber les neutrons et donc agir sur la réaction en chaîne. Ajouter ou retirer ces barres permet de faire varier la puissance de la pile, la maintenir en marche ou l’arrêter. À 15 h 25, un des chercheurs

Un atome d’uranium est cassé sous l’impact d’un neutron en deux noyaux plus légers, libérant d’autres neutrons qui vont à leur tour briser ces deux noyaux, puis les suivants.

Réaction en chaîne

retire de la pile une barre de commande, déclenchant la réaction en chaîne de fission nucléaire. Durant vingt-huit minutes, la réaction se maintient, libérant 0,5 watt. Une puissance très, très faible, qui n’aurait même pas pu cuire un œuf… mais la preuve que l’on peut libérer de l’énergie à partir des atomes. Et donc fabriquer un réacteur nucléaire.

1. Protons

Le LHC propulse deux faisceaux de protons l’un contre l’autre, ce qui libère une énergie avoisinant celle qui suivit immédiatement le big bang.

2. Boson de Higgs

L’énergie devient matière, dont une particule soupçonnée d’être le boson de Higgs. Elle disparaît presque instantanément, mais laisse une empreintetémoin de décomposition.

2012

6

Le Cern détecte enfin le boson de Higgs

uarante-huit ans ! C’est le temps que les physiciens du monde entier ont passé à chercher la particule qui valide toutes les théories sur la matière. L’existence de celle qu’on surnomme la « particule de Dieu » a été postulée en 1964, lorsque le physicien britannique Peter Higgs (né en 1929) propose une théorie sur la façon dont les particules obtiennent une masse. Il suggère que l’espace vide est occupé par un champ appelé champ de Higgs, où les particules traversantes collectent de la masse, comme les électrons, ou n’interagissent pas du tout avec le milieu et restent sans masse, comme les photons. Un peu comme si une personne traversant une foule d’étrangers passait sans être retenue, alors que si elle rencontrait des amis elle s’arrêterait pour parler, augmentant ainsi le temps nécessaire pour traverser la foule. Dans ce cas, les amis seraient les bosons de Higgs.

LHC. Jusqu’au 4 juillet 2012, cette insaisissable particule manquait au grand bestiaire des physiciens. C’est cachée sous terre, dans le Grand Collisionneur de hadrons (LHC) du Cern (Organisation

européenne pour la recherche nucléaire), près de Genève, qu’elle a fini par être repérée. Là, dans ce gigantesque anneau de 27 km de diamètre, deux faisceaux de particules (des protons) sont lancés dans des directions opposées et accélérés jusqu’à la vitesse de la lumière, de sorte qu’ils puissent entrer en collision.

Du fracas de leur rencontre émergent le boson de Higgs et d’autres particules subatomiques. Une découverte de taille, puisqu’elle a validé la théorie et ouvert la voie vers une meilleure compréhension de notre Univers, avec en point de mire la matière noire et l’antimatière.

Boson de Higgs

Collision de protons

© Illustrations : Ed Crooks ; Wiki / cellanr / Dyor ; Alamy

Q

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DOSSIER

1919

7

Eddington valide la théorie d'Einstein

L

e 29 mai 1919, Arthur Eddington (1882-1944), un astronome et mathématicien anglais, met le cap sur l’île de Principe, au large de l’Afrique. La raison ? Une éclipse solaire va bientôt se produire, et la petite île est le meilleur endroit au monde pour l’observer. La pluie manque de faire rater le spectacle, mais les énormes télescopes que le scientifique a fait transporter à des milliers de kilomètres de son laboratoire parviennent finalement à observer le moment magique où la Lune passe devant le Soleil. Ils se concentrent également sur l’amas des Hyades, un groupe de 400 étoiles situé à 150 années-lumière de la Terre, qui se trouve à ce moment-là à proximité de notre Soleil. Surprise : l’amas

n’est pas là où il devrait être ! La lumière renvoyée par ces étoiles, lors de son voyage de 150 années-lumière, a en fait été détournée et pliée par la force d’attraction du Soleil. Cette déviation est minime, mais elle suffit à Eddington pour tirer une conclusion : Albert Einstein avait raison ! Quatre ans plus tôt, en 1915, le célèbre scientifique allemand avait en effet publié sa théorie de la relativité, qui explique des concepts comme les liens entre l’espace et le temps, la vitesse de la lumière, etc. Pour que celle-ci soit validée, il fallait d’abord vérifier un paramètre : la lumière est censée ployer près d’une grande force gravitationnelle. Avec les observations d’Eddington en Afrique, c’est chose faite.

L’éclipse de 1919 2. Position des étoiles Eddington et son équipe observent la position des étoiles pendant l’éclipse, lorsqu’elles sont proches du Soleil, et la comparent à leur position habituelle.

3. Effet de lentille gravitationnelle

Comme la théorie de la relativité d’Einstein l’avait prédit, le chemin de la lumière émise par les lointaines étoiles des Hyades s’est courbé à cause de la force gravitationnelle du Soleil.

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1. Soleil

Notre astre, temporairement caché par la Lune, se trouve à ce moment-là à proximité des Hyades, un amas de 400 étoiles.

1747

8

Lind guérit le scorbut des marins

L

a vie de pirate au XVIIIe siècle n’a rien de réjouissant : gencives qui saignent, dents qui tombent, muscles affaiblis, jambes enflées et vilaines taches de sang sous la peau… Les pirates n’adoptent pas ce look abominable pour terrifier leurs victimes : ils sont en réalité malades, atteints de scorbut. Les marins, eux aussi, souffrent de ce mal dont les origines sont alors inconnues. Est-il contagieux ? La folie peut-elle le provoquer ? Personne ne le sait.

VITRIOL.

En 1747, James Lind (1716-1794), un médecin écossais, est chirurgien en chef du navire HMS Salisbury, où de nombreux marins souffrent de cette étrange maladie. L’homme de science décide de tester différents traitements. En plus de la nourriture servie à bord, un groupe devra manger un citron et deux oranges par jour ; pour un autre, ce sera une pinte de cidre ; d’autres marins avaleront six cuillerées de vinaigre ou encore de la pâte d’orgeat. Pis, certains seront mis au régime « gouttes d’élixir de vitriol », autrement dit de l’acide sulfurique ! Verdict ? Au bout de quelques jours,

VITAMINE C.

Nous savons aujourd’hui que le scorbut est en réalité causé par un déficit en vitamine C. Isolée dans les années 1930 seulement, celle-ci est essentielle pour former du collagène,

un type particulier de protéines nécessaires au maintien et à la structure de l’organisme. Sans collagène, les os et les vaisseaux sanguins se dégradent progressivement, jusqu’à la mort lente et douloureuse du malade. Au XVIIIe siècle, à bord des bateaux qui partent pour de longs voyages de plusieurs mois, on emporte peu de produits frais, comme les légumes et les fruits, qui risquent de pourrir. Une erreur, car ce sont d’excellentes sources de vitamine C ! Leur absence à bord explique que les marins tombent malades alors qu’ils étaient en pleine

forme sur la terre ferme. Avec son expérience, le médecin écossais a non seulement découvert un remède contre le scorbut, mais aussi jeté les bases de la recherche clinique.

© Illustrations : Ed Crooks ; Wiki / cellanr / Dyor ; Alamy ; Shutterstock ; Fotolia

les marins soumis au régime comprenant des agrumes sont presque totalement guéris. À l’époque, le savant ne comprend pas bien ce qui, dans les citrons et les oranges, a permis le bon rétablissement des malades. Il pense que c’est leur acidité qui a détruit les fluides néfastes circulant dans le corps…

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DOSSIER

vers 1865

9

Mendel pose les lois de l’hérédité

P

ourquoi avons-nous les yeux bleus ou marron, les cheveux blonds ou bruns ? Pour tenter de percer ce mystère, Johann Gregor Mendel (1822-1884), un moine et botaniste autrichien installé dans un monastère en Moravie (actuelle République tchèque), a une drôle d’idée : il s’amuse à croiser des pois à graines lisses avec des pois à graines ridées afin d’observer à quoi ressemblera leur descendance. Forme des gousses et des graines, hauteur de la plante, position de la fleur, couleur des graines, des gousses et des fleurs… Toutes leurs caractéristiques observables sont passées au peigne fin.

DOMINANT.

Pendant huit années, Mendel aurait ainsi étudié pas moins de 28 000 plants de pois ! Il en tire un constat étonnant : lorsqu’il croise un pois à graines lisses et un pois à graines ridées, les « enfants pois » sont essentiellement des pois à graines lisses. Mais s’il croise ces « enfants pois » à graines lisses entre eux, surprise : les trois quarts des nouveaux « enfants pois » obtenus ont bien des graines lisses, tandis que le quart restant a des graines ridées ! Il en déduit que le caractère ridé est resté caché dans les pois à graines lisses, mais qu’il n’a pas disparu pour autant. Comment cela est-il possible ? Lors d’un croisement de plantes entre elles, la descendance reçoit des informations de la part des deux parents. Les premiers « enfants pois » nés du croisement de pois à graines ridées avec des pois

3. Deuxième génération

à graines lisses devaient donc contenir chacun en eux le caractère lisse, apparent, mais aussi le caractère ridé, resté silencieux. Puisque le premier caractère semble prendre le pas sur le second, Mendel qualifie le premier de dominant, et le second de récessif. Et si, lors du second croisement, celui entre des pois à graines lisses uniquement, des « enfants pois » à graines ridées sont réapparus, c’est parce qu’ils ont reçu de chacun de leurs parents le caractère « ridé », jusque-là resté caché ! Cette compréhension de la façon dont se transmettent les caractères entre générations a été développée sous le nom de « lois de Mendel ». Avec la découverte des chromosomes, support de notre hérédité, ces lois sont à la base d’une nouvelle discipline, la génétique (lire aussi pp. 38-47).

L’expérience des pois

Les pois issus du croisement des pois de première génération entre eux donnent trois pois à graines jaunes et lisses pour un pois à graines vertes et ridées : les premiers expriment le caractère dominant (jaune et lisse) tandis que le dernier exprime le caractère récessif (vert et ridé).

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Johann Gregor Mendel (rangée du fond, à droite) photographié ici avec ses compagnons moines.

1895

10

Marconi invente le sans-fil

1. Parents

Le moine botaniste croise deux plantes de lignée pure présentant des caractéristiques physiques distinctes. On dit que leur phénotype est différent. L’une des plantes a des graines jaunes et lisses, l’autre des graines vertes et ridées.

2. Première génération

Les premiers descendants des pois croisés sont tous des pois à graines jaunes et lisses : ils expriment le caractère dominant (jaune et lisse), porté par l’un des parents.

4. Autopollinisation

Après les croisements initiaux, Mendel laisse les pois se reproduire naturellement entre eux dans le but de créer une lignée génétique unique.

C

omment faisait-on avant le téléphone portable ? Il fallait tout le temps être relié à un fil ! Si nous pouvons aujourd’hui communiquer d’un bout à l’autre de la planète sans que nos messages ne circulent le long de câbles, c’est grâce à une technologie mise au point par le physicien italien Guglielmo Marconi (1874-1937). À seulement 21 ans, ce génie réussit à transmettre un signal sur une distance de 2,4 km dans les Alpes suisses, sans l’aide d’aucun fil : en 1895, c’est une petite révolution ! Mode d’emploi de ce qu’on appellera plus tard la télégraphie sans fil : avant tout, apprendre l’alphabet Morse, dans lequel les lettres sont représentées par des

RADIO. Le 12 décembre 1901, Marconi tente de transmettre un message sans fil sur une distance bien plus longue, au-dessus de l’océan Atlantique, entre Poldhu, dans le sud-ouest de l’Angleterre, et TerreNeuve, une île du Canada : pari réussi ! Les bases des télécommunications viennent d’être mises au point. La radio, puis le téléphone portable ou encore internet suivront, agrandissant sans cesse le monde des communications sans fil.

© Illustrations : Ed Crooks ; Wiki ; SPL

Le premier signal radio transatlantique a été envoyé entre Poldhu, en Angleterre, et TerreNeuve, au Canada.

combinaisons de signaux longs et de signaux courts. Puis se munir d’un manipulateur morse, une machine capable de traduire ces signaux courts et longs en étincelles courtes ou longues : des ondes électromagnétiques sont créées et se propagent dans l’air. Installer une antenne capable de recevoir ces signaux électromagnétiques, lesquels, quand ils sont captés, déclenchent une cloche reproduisant les signaux longs et courts envoyés. Enfin, traduire le message !

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S C IE N C E S

ADN

LA RÉVOLUTION GÉNÉTIQUE En décembre dernier, l’association AFM-Téléthon fêtait ses 60 ans, mettant à l’honneur six décennies de lutte contre les maladies génétiques rares. Et avec elles, autant de progrès dans la recherche. Car pour soigner ces maladies, il fallait d’abord comprendre leur origine. Impensable il y a encore 150 ans, lorsque Gregor Mendel, moine et botaniste autrichien, découvrait – sans le savoir – les ressorts de l’hérédité. . . Depuis son identification (en 1953 seulement), la molécule d’ADN a été scrutée, séquencée, modifiée. Mais de quoi est-elle faite ? À quoi sert-elle ? Comment expliquer qu’elle soit propre à chacun et pourtant transmise de génération en génération ? Surtout, comment peut-on l’utiliser ? Et jusqu’où peut-on aller ? Le point sur l’un des plus grands bouleversements scientifiques de notre époque : la révolution génétique. Par Myriam Dogmi

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© SPL ; Getty

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SCIENCES

L’ADN, manuel de fabrication des Chromosome

Un être humain possède 46 chromosomes, soit 23 paires, contenant environ 20 000 gènes au total.

Noyau

Entouré d’une double membrane, le noyau de la cellule contient ses informations génétiques.

Double hélice

Paires de bases

L’ADN est constitué de deux brins complémentaires qui se font face et s’enroulent l’un sur l’autre, s’ouvrant comme une fermeture Éclair lors d’une réplication de l’ADN.

Les bases forment les « barreaux de l’échelle ». Elles viennent toujours par paires : l’adénine s’apparie avec la thymine, et la guanine avec la cytosine.

Histones

Ces protéines associées à l’ADN permettent de réguler l’expression des gènes.

C’est quoi l’ADN ? L ’ADN, ou acide désoxyribonucléique, est la molécule support de notre information génétique, présente dans toutes nos cellules (et toutes celles des êtres vivants en général) à l’exception des globules rouges, sans noyau. Elle se présente comme une très longue phrase, composée de milliards de lettres ! Ces lettres sont piochées dans un alphabet restreint, comprenant seulement le A, le C, le T et le G. L’ADN se présente donc sous la forme d’une succession de « TAGGCGATGCAA… », un peu comme un code informatique dont les 0 et 1 auraient été remplacés par ces quatre lettres.

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Pourquoi celles-ci, et pas le E, le P ou le X ? Parce que chacune correspond à l’initiale d’une molécule : A pour adénine, C pour cytosine, G pour guanine et T pour thymine. Ces molécules sont les constituants de base de l’ADN – elles sont d’ailleurs appelées « bases ». Chaque base est associée à une molécule phosphate et une molécule de sucre appelée ribose, le tout formant un nucléotide. L’ADN est donc une longue succession de nucléotides.

HÉLICE.

La suite de lettres décrite ci-dessus n’est en réalité pas unique. Chaque phrase d’ADN est associée,

au niveau de ses bases, à sa phrase complémentaire. En effet, les lettres s’associent par paire : A avec T et G avec C. Ainsi, chaque A de la phrase 1 se lie à un T de la phrase 2, et chaque G à un C. Les deux phrases, appelées brins, se font face et s’enroulent l’une sur l’autre à la façon d’une double hélice. Cette double hélice se pelotonne sur elle-même et s’enroule autour de protéines appelées histones, pour former un chromosome. Chez l’homme, l’ADN est constitué de 23 paires de chromosomes, soit 46 chromosomes en tout.

êtres vivants L’ADN, support de l’identité

L

’ADN est donc composé de 92 phrases puisqu’il est contenu dans 46 chromosomes, chacun constitué de deux phrases. Chacune contient

le code de programmation, en quelque sorte la « recette » des constituants corporels. Le corps déchiffre en effet chaque phrase pour se construire et fonctionner au quotidien. Pour simplifier la lecture, chaque phrase est découpée en « sous-phrases » qui, lorsqu’elles sont lues, remplissent une fonction dans l’organisme. Ces sous-phrases sont ce que les scientifiques nomment les gènes. La lecture de chaque gène permet de produire une protéine, constituant essentiel et primaire du corps. Les muscles, par exemple, sont constitués d’un grand nombre de protéines ayant chacune un rôle à jouer pour que la contraction soit possible.

HÉRÉDITÉ. Les gènes sont de longueur variable (30 000 paires de bases en moyenne). Leur constitution

(la succession de bases) est spécifique selon leur rôle dans l’organisme. On dit qu’un gène code pour un caractère. Même si en réalité, un gène peut générer la production de plusieurs protéines et que réciproquement, un caractère peut être la résultante de l’expression de plusieurs gènes : c’est par exemple le cas pour la caractéristique « couleur des yeux », codée par plusieurs gènes. Les chromosomes, et donc les gènes, se nichent dans les noyaux de nos cellules, et notamment de nos cellules sexuelles (spermatozoïdes pour les hommes, ovules pour les femmes). Cela explique que l’enfant, formé à partir de la rencontre des deux cellules sexuelles de ses parents, possède à la fois des caractères de son père et de sa mère. L’ADN, support de l’identité, est aussi support de l’hérédité.

zoom sur L’hérédité Parents porteurs

Gamètes

Chaque enfant hérite d’un gène de la mère et d’un gène du père, ces gènes étant présents dans les cellules sexuelles (gamètes) des parents.

Enfant affecté

Un enfant sur quatre reçoit deux copies du gène défectueux. Par conséquent, il ne peut pas produire de mélanine : il souffre d’albinisme.

Enfant sain

Un enfant sur quatre reçoit un gène sain de son père et un gène sain de sa mère : il n’est pas porteur de la maladie.

Enfants porteurs

Deux enfants sur quatre sont porteurs, comme leurs parents, d’un gène normal et d’un gène défectueux.

© BSIP SA / Alamy ; Catherine Yeulet / Getty ; Thinkstock

Chacun des parents porte le gène de l’albinisme (en rose foncé), une maladie génétique qui se caractérise par un déficit de production de mélanine (le pigment responsable de la couleur de notre peau, de nos cheveux et de nos yeux). Mais ils possèdent aussi un gène normal (en rose clair), qui leur permet de fabriquer de la mélanine. Résultat : ils ne développent pas la maladie.

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SCIENCES

Gènes et mutations U

ne mutation est une modification de l’ADN. Elle peut avoir lieu dans la séquence d’un gène (ajout, suppression ou remplacement d’une ou plusieurs bases) ou dans le nombre de chromosomes. Les mutations peuvent être induites par l’environnement (le tabac ou le soleil, par exemple). Mais elles peuvent aussi apparaître de manière totalement aléatoire et inexpliquée au moment où la cellule copie son ADN avant de se diviser. Les conséquences des mutations sont différentes selon leur nature, le nombre de séquences concernées ou encore les bases touchées. Certaines de ces mutations sont dites silencieuses, car sans conséquence. Comme si l’on remplaçait la phrase « il entra une hache à la main » par « il rentra une hache à la main ». L’ajout d’une lettre ne change pas grand-chose. Mais d’autres mutations peuvent totalement modifier le sens de la phrase. Comme si « il entra une hache à la main » devenait « il entra une vache à la main ». Ces mutations, dites non silencieuses, peuvent conduire à l’apparition de troubles tels que la trisomie 21 (où le nombre de chromosomes est passé de 46 à 47) ou au développement de tumeurs (modification dans les gènes dits « suppresseurs de tumeur », qui assurent le contrôle de la division cellulaire).

Connaître l’ADN, pour G

regor Mendel, un moine et botaniste autrichien, est le premier à avoir étudié les mécanismes entrant en jeu dans le processus d’hérédité (lire aussi p. 36). Son but : comprendre la transmission des caractères d’une génération à l’autre. En 1865, au bout de neuf ans d’essais sur des pois, il comprend que les caractères de la nouvelle génération (dite fille) résultent d’un héritage provenant à 50 % du « père » et à 50 % de la « mère ». Quatre ans plus tard, le biologiste suisse Friedrich Miescher note qu’il existe dans le noyau des cellules une molécule de composition inconnue. Puis, en 1905, William Bateson, biologiste britannique,

est le premier à parler de génétique lorsqu’il reprend les travaux de Mendel. Mais c’est généralement à James Watson, généticien américain, Francis Crick, biologiste britannique, et Maurice Wilkins, physicien néo-zélandais, que l’on attribue la découverte de l’ADN. Ce sont en effet eux qui, en 1953, identifient pour la première fois la fameuse structure en double hélice.

SÉQUENÇAGE. Cinquante ans plus tard,

nouvelle révolution dans le monde de la génétique : après quinze ans de recherche, le Human Genom Project (Projet Génome Humain, en français) est achevé. Pour

Savoir d’où l’on vient Découvrir l’origine de ses ancêtres d’un simple coup de langue… Alléchant, non ? C’est ce que proposent aujourd’hui de nombreuses sociétés, parmi lesquelles iGenea ou MyHeritage. Leur technique : prélever votre ADN à partir d’un échantillon salivaire et l’analyser pour remonter votre arbre généalogique. En retour, vous recevrez la liste des continents et pays sur lesquels vivaient vos ancêtres, avec le pourcentage de votre ADN qui est issu de ces ancêtres. Et tout cela, très facilement. Il suffit en effet de précommander un kit sur internet (pour environ 90 euros), d’envoyer un échantillon de salive à l’adresse indiquée et d’attendre les résultats. En France, la commercialisation de tels tests n’est pas (encore) autorisée, par souci éthique. L’occasion de rappeler que notre identité dépend autant de notre éducation, de nos valeurs et de notre culture que de notre ADN.

les dates clés 1865

Gregor Mendel, père de la génétique moderne, observe la façon dont se transmettent les caractères visibles dans les pois de son jardin.

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1869

Friedrich Miescher note  qu’il existe dans le  noyau des cellules une  molécule de composition inconnue.

1905

William Bateson est le  premier à utiliser le terme « génétique » pour décrire l’étude de  l’héritage biologique.

1953

Francis Crick (photo) et  James Watson révèlent la structure à double hélice de l’ADN grâce aux  rayons X.

2003

Achèvement du  Projet Génome Humain, qui a cartographié l’ADN humain.

quoi faire ? la première fois, le génome humain est entièrement séquencé. Enfin presque. Car 10 % de la molécule d’ADN reste inconnue, a priori vide de gènes. On sait, grâce à ce projet international, que l’ADN humain porte l’information génétique sur environ 20 000 gènes. Connaissant l’ADN, les chercheurs peuvent désormais analyser les différences qui existent entre les individus, comprendre qui fait quoi dans la molécule, localiser les mutations et identifier les modifications responsables de maladies. Depuis, l’ADN a fait l’objet d’innombrables études dans le monde entier, qui ont été décisives dans de nombreux domaines.

Ongles, cheveux, postillons, sueur… L’ADN, on en laisse partout. Présent dans chacune de nos cellules, il se dépose en effet à chaque endroit où l’on passe, sur chaque surface que l’on touche. C’est sur cela que comptent les enquêteurs de police scientifique pour retrouver les criminels. L’ADN n’est en effet rien d’autre que notre carte d’identité biologique. En prélevant des échantillons biologiques sur la scène de crime, les experts peuvent analyser l’ADN des personnes passées par les lieux et le comparer aux quelque 3 millions de séquences recensées dans leur base de données, le Fnaeg (Fichier national des empreintes génétiques). Depuis 2003, il contient les données de toute personne mise en cause dans un délit ou un crime. Si l’ADN suspect correspond à un ADN fiché (c’est-à-dire s’il est identique à l’ADN suspect sur 13 gènes spécifiquement analysés par les scientifiques), alors les enquêteurs peuvent se pencher sur le suspect d’un peu plus près. Bien sûr, les erreurs existent, notamment lorsque deux individus ont un ADN très proche. Même si cela est extrêmement rare (une chance sur un milliard), c’est possible, et cela s’est déjà produit une dizaine de fois. Le test ADN est donc indissociable de l’enquête classique. © Peter Kim / Getty ; Marc Lieberman ; Thinkstock ; Shutterstock

Confondre les criminels

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SCIENCES

Les utilisations en médecine La production de protéines thérapeutiques L es protéines thérapeutiques étaient autrefois extraites de la nature (plantes, sang animal ou humain). Pour diminuer le risque sanitaire et augmenter le rendement, elles ont ensuite été conçues chimiquement en assemblant les différentes molécules les constituant. Grâce aux progrès de la génétique, il est désormais possible de les produire directement à partir de leur gène d’origine : une technique nommée transgenèse. Le gène d’intérêt, appelé

transgène, est isolé puis inséré dans un ADN vecteur (servant de transporteur), lui-même injecté dans une cellule vivante qui le lira et le traduira en protéines comme s’il s’agissait de son propre ADN.

INSULINE. Les protéines produites sont libérées par la cellule vivante, récupérées dans le liquide environnant, isolées et purifiées afin d’être ensuite utilisées. Les cellules hôtes les plus utilisées sont les bactéries, grandes favorites en raison

de leur rapidité de production. On se sert également de cellules végétales et animales, notamment quand la structure de la protéine d’intérêt est plus complexe et nécessite des modifications que seules ces cellules sont à même d’effectuer. L’insuline, protéine régulant le taux de sucre dans le sang, est la première à avoir été conçue grâce à des cellules bactériennes, au début des années 1980. Elle est aujourd’hui mondialement utilisée dans le traitement du diabète de type 1.

La thérapie génique cellulaire du patient pour lire son propre ADN (voir Tout Comprendre n° 101, p. 38). En injectant le virus porteur du gène sain dans le corps du patient, on est donc sûr que ce gène sera lu par le patient. La protéine manquante ou défaillante sera remplacée par sa version fonctionnelle au sein même de l’organisme.

PIONNIERS. Évidemment, le virus

U

tiliser une cellule vivante pour faire exprimer un gène d’intérêt : la technique n’est pas uniquement réservée à la production de protéines thérapeutiques. Elle est également utilisée en thérapie génique, technique qui consiste à suppléer ou remplacer le gène malade d’un patient. Au programme : insertion du transgène dans un ADN vecteur puis injection dans

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une cellule vivante. Jusqu’ici, rien de différent par rapport à la production de molécules thérapeutiques. Sauf que la thérapie génique, plutôt que d’utiliser une bactérie ou une cellule animale ou végétale pour accueillir l’ADN, utilise un… virus, qui, une fois prêt, est directement injecté dans le corps du patient. Étonnant ? Pas tant que ça, quand on sait que le virus utilise la machinerie

utilisé est au préalable rendu inoffensif par désactivation ou suppression de ses gènes virulents. Il peut ainsi soigner, sans aucun danger pour l’organisme. Cette technique, apparue en 1990, est aujourd’hui très utilisée pour le traitement de maladies génétiques rares, comme l’explique Serge Braun, directeur scientifique de l’association AFMTéléthon : « Avec le Généthon, l’un de nos laboratoires, situé à Évry, nous avons été l’un des pionniers dans l’utilisation de la thérapie génique. Récemment, cette méthode nous a d’ailleurs permis de développer un médicament contre l’amyotrophie spinale infantile, une maladie qui touche la moelle épinière et laisse à la plupart des bébés atteints une espérance de vie d’un an. Aujourd’hui, grâce à ce traitement, nous avons des patients qui peuvent marcher. »

ARN guide

Les scientifiques conçoivent une molécule d’ARN complémentaire à la séquence qu’ils souhaitent cibler.

L’Édition du génome L

ACCÈS

LIBRE . Et c’est là que ça se corse.

Car les ciseaux magiques pourraient tomber entre de mauvaises mains. Notamment depuis qu’ils sont vendus en accès libre sur internet. En 2016, Josiah Zayner, biochimiste américain, décide en effet de les commercialiser dans des kits contenant tout le nécessaire pour les tester : pipette, tube, ADN, bactérie… Pour un prix allant de 23 à 139 euros, il est ainsi possible de modifier l’ADN d’une bactérie de sorte à la faire changer de couleur, ou celui d’une levure pour rendre la bière fluorescente. Si ces applications restent inoffensives, la molécule pourrait tout aussi bien être utilisée pour rendre des bactéries résistantes aux antibiotiques, par exemple… avec des conséquences dramatiques pour les populations. La Food and Drug Administration, qui régit l’autorisation de vente des produits relatifs à la santé et à l’alimentation aux États-Unis, condamne d’ailleurs la commercialisation de tels kits. Autre problème : outre les questions éthiques que l’édition d’ADN soulève, de nombreux scientifiques s’interrogent sur les effets à long terme de tels outils. En 2017, une équipe américaine mettait en évidence des bugs de CRISPR qui coupaient parfois à des endroits imprévus. Avec des répercussions imprévisibles…

Le Téléthon en Chiffres

1958

Date de création de l’Association française contre les myopathies (AFM)

Cas9

Reconnaissance

Cette protéine est attachée à l’ARN guide.

L’ARN guide repère et va s’apparier à la séquence cible, apportant avec lui la protéine Cas9.

Coupure

Cas9 joue son rôle de ciseaux et coupe les deux brins d’ADN de façon nette.

Nettoyage

La cellule, qui constate le problème, enlève la séquence coupée.

Édition

Le gène d’intérêt (introduit par le scientifique) est inséré au niveau de la place vacante.

Applications

CRISPR-Cas 9 peut être utilisé dans un grand nombre d’organismes parmi lesquels des plantes, mais aussi des animaux de laboratoire ou encore des embryons.

1987

Date du début des recherches

500

chercheurs travaillent pour l’AFM (en plus des 650 salariés)

1,3

milliard

C’est le montant, en euros, consacré à la recherche depuis la  création de l’association

450

maladies sont concernées par les recherches (maladies rares et  neuromusculaires)

15 ans

C’est l’espérance de vie gagnée depuis le début des recherches pour les pathologies les plus graves, comme les maladies neuromusculaires

© Getty Images / iStockphoto ; Jose Antonio Penas / SPL

a recherche en génétique a pris un nouveau tournant lors de la découverte en 2012 du complexe moléculaire « CRISPR-Cas9 ». Derrière ce nom, une protéine, « Cas9 », capable de couper l’ADN de façon précise grâce à un ARN (acide ribonucléique, une molécule proche de l’ADN) guide, qui la conduit jusqu’à la séquence à couper. Révélée par deux chercheuses, la Française Emmanuelle Charpentier et l’Américaine Jennifer Doudna, la découverte de CRISPR-Cas9 fait l’effet d’un véritable raz-de-marée. Pour la première fois, il est possible de cibler précisément un gène pour le couper ou le remplacer. Éditer le génome à coup de couper/coller devient alors un jeu d’enfant !

TOUT COMPRENDRE | 45

SCIENCES

Des applications controversées Les OGM C

onstruits eux aussi par transgenèse (insertion d’un gène d’intérêt dans un ADN vecteur avant d’injecter le tout dans la cellule hôte souhaitée), les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont particulièrement controversés dans le domaine agroalimentaire. Le gène d’intérêt n’est ici pas utilisé pour produire un médicament ou pallier un gène malade, mais pour conférer de nouvelles propriétés à l’organisme hôte. Pour les plantes, les scientifiques choisissent généralement un gène permettant de résister aux maladies ou à la sécheresse. Le but : diminuer

les pertes et augmenter le rendement des récoltes. Le maïs OGM peut ainsi contenir un gène qui augmente sa résistance face aux insectes, en lui permettant de produire une protéine toxique pour les nuisibles.

CRAINTES. L’introduction de telles propriétés est au cœur des débats soulevés par les OGM. En particulier parce que consommer des produits transformés fait naître de nombreuses craintes pour la santé (toxicité, risque d’allergies ou de développement des tumeurs…). Pourtant, à ce jour, aucune étude n’a

permis de démontrer de risque avéré. L’Organisation mondiale de la santé affirme d’ailleurs que ces produits font l’objet d’évaluations et de tests encore plus poussés que les aliments classiques pour s’assurer qu’ils ne présentent pas de risque pour la santé. Pour d’autres, le débat est ailleurs. Ils défendent l’idée qu’au lieu de transformer des aliments pour produire plus et ainsi « abolir la faim dans le monde » (l’une des promesses de la révolution OGM), une solution aurait pu être de mieux gérer et répartir les ressources naturelles…

4

2 1

5

3

1. Le plasmide (boucle fermée d’ADN bactérien, en bleu) est extrait de la cellule bactérienne.

2.

3. Le gène (en rouge) de l’ADN étranger qui doit être transféré dans l’ADN-T est également découpé.

4.

5. Le gène et l’ADN-T sont liés par une enzyme nommée ADN ligase. Un plasmide artificiel est ainsi formé.

6. La plante hôte et la bactérie contenant le plasmide artificiel sont mises en contact.

7. La bactérie transporte le gène d’intérêt dans les chromosomes de la plante.

8. Les cellules végétales grandissent en culture et produisent des graines contenant le transgène. La plante est alors un organisme génétiquement modifié.

L’ADN-T (ADN de transfert) du plasmide est découpé par des enzymes de restriction, qui éliminent certains gènes (en bleu foncé). L’élimination de gènes dans l’ADN-T (étape 2) laisse la place pour l’introduction de ce gène étranger.

6 8 7

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Le clonage L

es avancées en génétique ont également poussé les chercheurs à se pencher sur la possibilité de cloner des organismes. Au menu : prélèvement d’un noyau cellulaire (contenant l’ADN) de l’espèce à cloner, introduction de ce noyau dans une cellule débarrassée de son noyau d’origine (énuclée) et injection de la cellule nouvellement formée dans une mère porteuse. C’est ainsi qu’est née la célèbre brebis Dolly (photo), premier animal cloné au monde. Décédée prématurément en 2003, Dolly a ouvert la voie à la conception par clonage de nombreux autres animaux, parmi lesquels chiens, chats ou encore cochons. Dans certains pays tels que les ÉtatsUnis ou l’Australie, les autorités ont autorisé l’élevage d’animaux clonés et la commercialisation des produits issus de ces derniers. En décembre 2017 naissaient en Chine deux bébés singes au génome quasiment identique. Et avec eux, la question quant à la possibilité de cloner un jour d’autres primates… dont les humains. Une question pour l’heure

en suspens, tant le chemin semble long autant sur le plan scientifique que législatif (l’Assemblée générale des Nations unies interdit le clonage humain depuis 2005).

ESPÈCES DISPARUES. Le clonage afin de conserver le patrimoine génétique d’un individu pourrait par ailleurs être utilisé pour sauver des espèces. Les chercheurs vont plus loin et rêvent de ressusciter des espèces disparues (mammouth, tigre de Tasmanie, aurochs…). Parmi les méthodes testées, la réécriture génétique.

Il s’agit d’insérer des gènes de l’animal disparu dans le génome d’une espèce qui lui est génétiquement proche (en 2017, des chercheurs auraient ainsi combiné de l’ADN de mammouth à l’ADN d’un éléphant d’Asie). Par cette méthode, les scientifiques espèrent pouvoir recréer une espèce proche physiquement de celle disparue. Mais les changements effectués sur l’ADN étant nombreux, les chances d’obtenir un embryon viable sont très faibles. À ce jour, aucun n’a pu être injecté dans le corps d’une mère porteuse.

ujourd’hui, il est d’ores et déjà possible de savoir à quelles maladies l’on est génétiquement prédisposé. Une bonne chose pour anticiper les problèmes de santé. Une (peut-être) moins bonne chose pour la diversité et le hasard des naissances. En effet, connaissant son ADN, toute personne pourrait être tentée de choisir son ou sa partenaire en fonction de sa séquence génétique pour sélectionner (en partie) l’ADN et ainsi les qualités physiques ou intellectuelles de son chérubin… En outre, aurions-nous encore besoin d’un partenaire si le clonage humain venait à être autorisé ? Si ce n’est pour l’instant pas à l’ordre du jour, les scientifiques ne cachent toutefois pas leurs certitudes quant à la possibilité d’y parvenir.

Mais copier le modèle sera-t-il suffisant ? Les chercheurs ne seront-ils pas tentés de l’améliorer ? Une question à laquelle a déjà partiellement répondu le biophysicien chinois He Jiankui, qui annonçait, en novembre 2018, la naissance de jumelles génétiquement modifiées (par CRISPR, voir p. 45) pour les rendre résistantes au virus du sida. Si la technologie est aujourd’hui employée à bon escient pour se protéger des maladies, ses utilisations s’arrêterontelles là ? Certains ne seront-ils pas tentés de fabriquer des bébés sur mesure ? Un bébé aux yeux bleus plutôt que noirs, par exemple ? Une hypothèse pas si folle quand on sait que les chercheurs, au-delà de l’édition génétique, envisagent de pouvoir reconstruire entièrement un ADN humain d’ici à 2026…

© Getty ; Shutterstock ; Saporob / Dreamstime ; Illustration by Jo Smolaga ; Fair Dealing ; DR

Demain, fabriquer des êtres humains ? A

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NAT U R E

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les tempêtes de laissant une couche de glace lisse sur tout ce qui se trouve en dessous de 0 °C. Fréquentes dans le nord des États-Unis, ces tempêtes se produisent aussi au Canada et en Europe, comme sur cette photo, prise le 28 février 2018 sur les bords du lac de Constance, en Allemagne. Cette vague de froid, surnommée « le Moscou-Paris », était due à un puissant anticyclone s’étendant des îles britanniques au nord de la Russie. Dans sa partie sud, l’air glacial a glissé de Moscou jusqu’à Paris, refroidissant toute l’Europe sur son passage et cristallisant certains paysages.

© Steffen Schmidt / AP / SIPA

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eur passage fait place à un paysage irréel où bâtiments et végétation se transforment en sculptures de glace. Bien plus dangereuses que les tempêtes hivernales, les tempêtes de glace surviennent quand deux couches d’air froid prennent en sandwich une couche d’air chaud. La pluie traverse la première couche froide et gèle, arrive dans la couche chaude où elle fond complètement, puis pénètre dans la deuxième couche froide. Sa température descend sous le point de congélation, mais elle ne gèle qu’en atteignant le sol,

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N AT U R E

Comment se forme la neige ? Par Florian Cadu

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haque hiver, elle est très attendue : beaucoup rêvent de voir leur ville se réveiller sous la neige, et les plus chanceux accueillent l’apparition du premier flocon avec enthousiasme. Mais avant d’atterrir doucement sur le sol, il est passé par plusieurs étapes. Tout commence dans le ciel, au niveau des nuages. Quand la température est suffisamment basse (entre 0 °C et – 30 °C), des molécules d’eau microscopiques provenant de la vapeur du nuage se fixent sur une poussière en suspension dans l’atmosphère, comme le pollen ou une bactérie. Elles forment alors une gouttelette qui gèle à cause du froid et de la structure solide de la particule de poussière.

HEXAGONE. Sous l’effet de la

température, de l’humidité et du vent, d’autres molécules d’eau viennent s’agglutiner autour de ce premier cristal de glace, créant un flocon aux multiples branches, augmentant petit à petit sa taille. Ainsi que son poids, lequel le fait alors tomber du ciel. Un flocon qui arrive jusqu’à nous est en moyenne composé d’un milliard

de milliards de molécules d’eau, et les cristaux de glace qui le composent sont environ dix millions de fois plus petits que lui. Formé en l’espace de dix à soixante minutes, un flocon mesure généralement entre 2 et 5 mm de diamètre. Et certains peuvent grossir jusqu’à 2 cm – le Livre Guinness des records évoque même un flocon de 38 cm comme le plus imposant jamais recensé ! Mais au fait, pourquoi, la plupart du temps, ces flocons présentent-ils une forme étoilée ? Tout simplement parce que dès le départ, la structure en V propre aux molécules d’eau entraîne naturellement la production d’un noyau de glace de forme hexagonale (six côtés symétriques). Les molécules d’eau qui, par la suite, s’ajoutent à ce noyau en suivant sa structure, donnent naissance au fur et à mesure à six branches qui croissent sur chaque côté de l’hexagone. De nouvelles molécules d’eau s’agrègent à ces branches pour former de nouveaux cristaux semblables au premier, créant de nouvelles ramifications, et ainsi de suite… Jusqu’à ce que le flocon soit attiré au sol pour s’assembler à d’autres flocons et former un tapis blanc sous nos pas.

la genèse d’un flocon Poussière

À l’origine, le flocon n’est qu’une minuscule particule de poussière (pollen, bactérie…) flottant au niveau des nuages. C’est autour de cette particule que le flocon va naître.

Gouttelette

Des molécules d’eau provenant de la vapeur du nuage se solidifient progressivement autour de la particule. Une gouttelette se forme.

Cristal simple

Le froid gèle la gouttelette qui forme un prisme hexagonal (à six côtés symétriques). Sur chaque côté se crée une cavité dans laquelle de nouvelles molécules d’eau se rejoignent et gèlent à leur tour. Ce qui entraîne l’apparition de six branches.

Cristal complexe

Les courants d’air déplacent les flocons dans des régions de température et d’humidité variables, façonnant leur forme finale en permettant l’apparition de cristaux et de branches supplémentaires.

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Pourquoi les flocons sont-ils tous différents ? Si certains se ressemblent dans leur forme, tous les flocons sont uniques. Sans exception. Car au fur et à mesure de sa formation, chaque flocon est soumis à des conditions environnementales différentes. Plaques, colonnes, aiguilles pour les plus simples, dendrites à plusieurs PLAQUES

ramifications pour les plus complexes… En fonction de l’humidité, de la température ou encore des chocs encaissés lors de sa chute vers le sol, l’organisation des molécules d’eau va changer, et le flocon présentera une forme et une taille bien à lui (voir ci-dessous).

COLONNES

PLAQUES

Une présence importante d’eau dans l’atmosphère provoquera par exemple un grossissement du cristal de glace. Cependant, chaque flocon dispose normalement de six facettes analogues, quelle que soit sa forme finale, en raison de la structure moléculaire invariable de la glace. PLAQUES ET COLONNES

Aiguilles

Les structures en forme d’aiguille se forment en présence de plus d’humidité : c’est l’excès d’eau qui entraîne la production de ces minces glaçons.

Formes hybrides

Si les conditions environnementales changent pendant la production du cristal de glace, des formes insolites peuvent se développer. Comme, par exemple, ces grandes colonnes creuses ressemblant à des canettes qui peuvent se remplir si la température descend encore.

DENDRITES

Dendrites

L’augmentation de l’humidité permet la croissance de branches et de nouveaux cristaux autour de la plaque d’origine.

AIGUILLES

Plaques sectorisées

DENDRITES

Entre – 10 °C et – 20 °C et en présence de beaucoup d’humidité, les plaques se multiplient pour donner une forme d’étoile au flocon de neige.

COLONNES

COLONNES CREUSES

(CROISSANTE)

HUMIDITÉ DE L’AIR

PLAQUES SECTORISÉES

PLAQUES FINES PLAQUES

PLAQUES PRISMES PLEINS

PLAQUES PLEINES

0

Plaques

–5 °C

En premier lieu, ces simples cristaux de forme hexagonale se forment à environ – 2 °C.

– 10 °C

– 15 °C

Colonnes creuses

– 20 °C

Quand la température baisse (entre – 5 °C et – 10 °C), les plaques s’allongent et forment des sortes de colonnes creuses.

– 25 °C

– 30 °C

– 35 °C

TEMPÉR ATURE DE L’AIR (DÉCROISSANTE)

© Shutterstock ; Future Owns

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zoom sur Les Grêlons géants

C

es énormes balles de glace tombant du ciel peuvent frapper à n’importe quelle saison, y compris lors des orages d’été. Elles se forment généralement dans les cumulonimbus, ces gigantesques nuages à fort développement vertical. À l’intérieur, les puissants courants ascendants entraînent la vapeur d’eau qui se condense jusqu’à former des gouttelettes. Durant leur ascension, elles gèlent sous l’effet des basses températures. Les courants ascendants et descendants font faire des allers-retours à ces billes glacées qui accumulent d’autres couches de glace, un peu comme les strates d’un oignon, et grossissent pour finalement devenir des grêlons si lourds que l’air ascendant ne suffit plus pour les retenir en l’air. Les grêlons, extrêmement durs, peuvent atteindre une dizaine de centimètres et peser près de 2 kg.

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4. Croissance

De forts courants ascendants font remonter la grêle qui, lorsqu’elle retombe, accumule toujours plus de glace.

5. Chute

Finalement, les grêlons deviennent trop lourds pour être maintenus par le courant ascendant et tombent du nuage vers le sol.

6. Grêle fondue

Si les grêlons sont trop petits, ils fondent avant de quitter le nuage et tombent sous forme de pluie.

Glace transparente Dans les zones beaucoup plus froides, le gel se forme plus rapidement, emprisonnant davantage d’air, ce qui produit des couches de glace blanche.

Dans les zones juste en dessous de 0 °C, le gel se produit lentement, permettant à l’air de s’échapper et formant ainsi de la glace transparente.

Rotation

Le grêlon tourne sur lui-même en tombant, agrégeant des couches de glace et prenant la forme d’une sphère.

3. Couches de glace À mesure que le noyau de glace traverse des zones de températures différentes, il accumule d’autres couches de glace.

2. Congélation

Lorsque les gouttelettes atteignent de hautes altitudes, les basses températures les congèlent en noyaux de glace.

1. Courant chaud

L’air humide est aspiré dans le nuage orageux par un courant ascendant chaud, où il refroidit et se condense en gouttelettes d’eau.

© Rex Simon Brewer / Corbis

Glace blanche

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E SPAC E

SAUVER LA

TERRE DEPUIS

L’ESPACE Filant en silence au-dessus de nos têtes, une armada de satellites surveille en permanence notre planète. Rien n’échappe à leurs radars et leurs caméras. Une atmosphère qui étouffe, un iceberg géant qui se détache, des forêts qui disparaissent. . . Ils sont là pour nous alerter et nous aider à protéger la Terre des catastrophes. De vrais anges gardiens.

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© ESA / P. Carril ; Nasa Earth Observatory ; Nasa Goddard Institute for Space Studies

E S PA C E

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a Terre est un endroit fragile. Un équilibre délicat de pressions, de températures et de gaz nous maintient en vie tandis que notre atmosphère laisse entrer juste ce qu’il faut de chaleur solaire pour que nous puissions en bénéficier. Pendant de nombreuses années, notre planète s’est bien débrouillée. Mais aujourd’hui, avec l’intervention des humains, tout est en train d’être bouleversé : climat qui se réchauffe, forêts qui disparaissent, pollutions massives… Pour que la Terre survive encore longtemps, elle a besoin d’une aide efficace. Bonne nouvelle : de nombreuses missions spatiales nous offrent déjà de précieux outils pour cela. Grâce à des satellites d’observation en orbite, les scientifiques surveillent la Terre depuis des décennies, étudiant comment la planète palpite et évolue avec le temps. Depuis l’espace, on peut observer les animaux migrer, identifier et prévoir les changements environnementaux, et même résoudre des problèmes dès qu’ils sont découverts.

Les satellites Sentinel Sentinel-6

Cette mission, dont le lancement est prévu dans les années 2020, mesurera la hauteur des océans et surveillera les changements de température dans l’atmosphère.

Sentinel-5

Ce sont deux satellites jumeaux, dont le lancement est prévu dans les années 2020 et qui mesureront la composition de l’atmosphère, y compris les taux d’ozone et de méthane.

AÉROSOLS.

Un bon exemple est  l’effort mondial qui s’est mis en place, en 1987, pour réparer un trou grandissant dans la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique, visible depuis l’espace. Deux ans auparavant, les scientifiques avaient découvert que des produits chimiques appelés chlorofluorocarbones (CFC) – produits, entre autres, par les réfrigérateurs et les bombes aérosols – augmentaient le diamètre de l’ouverture. Les pays du monde entier se sont alors engagés à éliminer progressivement l’utilisation des CFC, dans le cadre du protocole de Montréal. Début 2018, le satellite Aura de la Nasa a constaté que le trou rapetissait. L’agence spatiale américaine estime qu’il devrait être complètement réparé au plus tard en 2080. La preuve que tous les pays peuvent travailler ensemble pour le plus grand bénéfice de la planète. Aura fait partie d’un projet plus vaste de la Nasa, le Système d’observation de la Terre, ou EOS (Earth Observing System, en anglais). Sa genèse remonte aux années 1980, les experts de la Nasa souhaitant, à l’époque, placer régulièrement des instruments en orbite pendant au moins quinze ans. Un besoin qui s’est fait plus pressant avec la découverte du trou dans la couche

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Sentinel-5P

Lancé en octobre 2017, ce satellite est le précurseur des Sentinel-5. Son spectromètre mesure la pollution de l’air.

Sentinel-1

Lancés en 2014 et 2016, les deux satellites Sentinel-1 envoient en continu des images, de jour comme de nuit et par tous les temps, ce qui permet de coordonner une intervention d’urgence en cas de besoin.

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nouveaux protecteurs de la Terre

2018 : Aeolus

En août 2018, le satellite Aeolus (Éole, en latin) de l’ESA est parti sonder l’atmosphère et étudier les vents grâce à son laser. Il aidera ainsi à prévoir des phénomènes extrêmes tels que les ouragans, mais aussi à améliorer les modèles de prévisions météo.

2020 : Biomass

Sentinel-2

Les deux Sentinel-2, lancés en 2015 et 2017, surveillent l’urbanisation des sols et l’évolution des forêts, mais peuvent aussi scruter les océans et vérifier l’état de santé des récifs coralliens.

Sentinel-4

Lorsque ces engins seront en orbite dans les années à venir, ils serviront à surveiller les gaz à l’état de traces et les aérosols dans l’atmosphère.

La mission Biomass de l’ESA se concentrera sur l’évolution des forêts. Le satellite déterminera par des mesures radar la quantité de biomasse et de carbone stockée dans les forêts, notamment tropicales.

2020 : Landsat 9

Landsat 9 sera le prochain grand imageur de la Nasa, conçu pour observer la surface terrestre mondiale et suivre les changements naturels aussi bien que ceux causés par l’homme sur la planète.

Années 2020 : HyspIRI

Les Sentinel-3A et 3B, lancés en 2016 et 2018, surveillent la pollution marine et la couleur des océans, qui reflète la quantité du plancton marin.

Image satellite en couleurs réelles des récifs coralliens de la mer Rouge, le long des côtes de l’Arabie saoudite.

2022 : Flex

Ce projet de l’ESA aura pour objectif de mieux comprendre de quelle façon le carbone circule entre la végétation et l’atmosphère, en mesurant la lumière émise par les plantes lors de la photosynthèse.

© ESA ; Copernicus (2015) / ESA ; Fair Dealing

Sentinel-3

Cette mission de la Nasa utilisera l’imagerie infrarouge pour analyser comment et quand les éruptions volcaniques se produisent. Elle étudiera également la santé des sols, surveillera la déforestation et pourra alerter de l’imminence d’une sécheresse.

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E S PA C E d’ozone, puis la prise de conscience du réchauffement climatique. « L’activité humaine a modifié l’état de la Terre en reconfigurant le paysage, en changeant la composition de l’atmosphère mondiale et en exerçant de nombreuses pressions sur la biosphère, déclaraient-ils en 1993. Il y a des indications sérieuses qui montrent que le changement naturel est accéléré par l’intervention humaine. » Dans le cadre du programme EOS, plus d’une vingtaine de missions ont été lancées à ce jour, dont plusieurs satellites Landsat, qui ont fourni des images de la surface de tout le globe. La plupart de ces satellites ont été placés en orbite polaire : ils gravitent autour de la planète en passant par les deux pôles, donnant de la Terre, à mesure qu’elle tourne sur elle-même, une vue globale. La mission Terra, par exemple, lancée en 1999, avait pour objectif d’étudier les interactions entre les nuages, la Terre et la glace. Grâce à ce satellite, les scientifiques ont pu voir en direct une immense plateforme de glace se détacher de la péninsule antarctique en 2002. Ce même satellite, ainsi que Aqua, mis en orbite en 2002 pour étudier le cycle de l’eau, ont offert une vue globale de l’évolution du cycle de la végétation au cours d’une année et de l’impact du climat sur celle-ci. Ils ont aussi permis d’observer à quel point les glaces de mer (la banquise) de l’Arctique avaient une surface de plus en plus réduite l’été, ce qui implique davantage de lumière solaire absorbée plutôt que réfléchie, faisant encore grimper les températures mondiales.

COPERNICUS.

Grâce au programme EOS, les scientifiques gardent par ailleurs un œil attentif sur les taux de gaz toxiques dans l’atmosphère (comme le monoxyde de carbone dégagé par les grands feux). Ainsi, les populations peuvent être alertées en cas de pic de pollution, et encouragées à limiter leurs activités à l’extérieur afin de protéger leur santé. EOS surveille aussi les animaux menacés, comme les caméléons de Madagascar. Grâce à l’imagerie satellite combinée à la connaissance des habitats des animaux, on peut cartographier les lieux où ils sont susceptibles de vivre. Sans satellite, il faudrait aux équipes sur le terrain des milliers d’années pour trouver ces mêmes informations.

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L’union fait la force Inondations, tremblements de terre, éruptions volcaniques, feux, tsunamis… La Terre est régulièrement secouée par des catastrophes naturelles, et avoir une flotte d’engins spatiaux en orbite est un excellent moyen de lutter contre leurs effets. En 1999, l’ESA et l’agence spatiale française CNES ont élaboré la Charte internationale « Espace et catastrophes majeures », dont les 16 membres s’engagent, lors d’un tel événement, à partager les observations de leurs satellites et toutes leurs données disponibles. De cette façon, les autorités locales sont à même de réagir plus rapidement et de mieux guider les efforts des secours. Tous les six mois, un membre différent devient le « responsable de la charte » et coordonne les efforts, offrant une assistance gratuite aux services d’urgence du monde entier qui souhaitent utiliser ces informations vitales (voir infographie page de droite).

Le satellite Cryosat-2 de l’ESA, lancé en 2010, a permis de cartographier le niveau de la glace en Antarctique.

Des satellites aux hommes, la chaîne de réaction en cas de catastrophe Les satellites fournissent des données qui sont rapidement partagées pour diminuer l’impact des catastrophes et aider les victimes.

Étape 3

L’agent responsable des urgences identifie les satellites qui pourraient collecter des données utiles sur la catastrophe, et commence à rédiger un plan. Il contacte les agences spatiales concernées et le chef de projet.

Étape 2

L’opérateur de garde (OG) est disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Il collecte des informations pertinentes auprès de l’UA, telles que les coordonnées de la zone sinistrée, et les transmet à l’agent responsable des urgences.

Agent responsable des urgences

Étapes 3 à 6

Opérateur de garde

Étape 4

Les agences spatiales des pays membres de la charte planifient comment elles collecteront les données demandées. Elles programment les satellites pertinents et suggèrent des alternatives si les données demandées ne sont pas disponibles.

Membres de la charte

Le chef de projet supervise le processus et assiste l’UA. Il s’assure que les données sont exactes et envoyées aux bonnes personnes.

Chef de projet

Étape 1

Un utilisateur autorisé (UA), généralement un corps de secours, de sécurité ou de défense, soumet une demande à l’opérateur de garde.

Utilisateur autorisé

Une catastrophe a lieu

Expert

Étape 5

L’expert aide à traiter et à interpréter les données satellitaires de la zone sinistrée et à les transformer en images compréhensibles pour l’UA.

© ESA ; Nasa / DSCOVR EPIC team ; CPOM, Slater et Al. ; Nasa / USGS

Étape 6

Les informations pertinentes sont renvoyées à l’UA pour l’aider à planifier la réponse la plus sûre et la plus efficace à la catastrophe.

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E S PA C E Mais la Nasa n’est pas la seule à surveiller la planète. En Europe, l’Agence spatiale européenne (ESA) dirige le projet Copernicus, qu’elle a annoncé comme étant « le programme d’observation de la Terre le plus ambitieux à ce jour ». Appelé auparavant programme GMES (Global Monitoring for Environment and Security), il a démarré le 3 avril 2014 avec le lancement de Sentinel-1A. Ce satellite d’imagerie radar fournit des images de jour comme de nuit et sous toutes conditions météorologiques. Celles-ci sont utilisées pour cartographier la banquise ou suivre les marées noires. Une demi-douzaine de missions ont suivi, dont la dernière, Sentinel-3B, a été lancée le 25 avril 2018. Son objectif : surveiller la santé des océans. Ce satellite vole en formation avec son prédécesseur, Sentinel-3A. Ensemble, ils peuvent fournir des données globales de toute la planète sur une journée entière. Ils mesurent ainsi la température au-dessus des océans, le niveau des eaux, et même leur couleur (témoin du plancton qui y vit, signe de leur santé). Ils peuvent également surveiller les feux sauvages depuis l’espace, vérifier l’état de la végétation et cartographier l’utilisation des terres dans le monde entier. D’autres satellites Sentinel vont bientôt suivre. Au cours des prochaines années, on assistera au lancement des Sentinel-4 et Sentinel-5, qui étudieront la composition de l’atmosphère de notre planète, tandis que Sentinel-6 mesurera le niveau global des mers, pour des études océanographiques et climatiques.

ENGAGEMENTS.

Toutes ces données sont évidemment essentielles pour orienter la politique climatique à mener sur Terre. En 2016, 196 pays se sont réunis pour signer l’Accord de Paris sur le climat, un effort mondial visant à réduire nos émissions de carbone afin d’éviter que la température moyenne mondiale ne dépasse de 2 °C les niveaux préindustriels (avant 1850). Bien que les États-Unis se soient retirés plus tard de cet accord à la demande du président Donald Trump, c’est grâce à la prise de conscience qu’ont permise les satellites, que tous les États réunis sont parvenus à prendre des engagements significatifs. Reste maintenant à tenir ces accords. Et là encore, les satellites auront leur rôle à jouer, en tant que surveillants de l’espace.

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Vue d’artiste de Landsat 8, un satellite américain d’observation de la Terre lancé en 2013.

© ESA / P. Carril ; Nasa Earth Observatory ; Nasa Goddard Institute for Space Studies

Photographie de l’incendie géant « Camp Fire » en Californie, prise le 8 novembre 2018 par Landsat 8.

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TECHNO

Londres •

• Los Angeles

62 | TOUT COMPRENDRE

• Stad

• Pékin

• Macao

• Jeddah

Sur terre, dessous ou dans l’eau, des constructions aux dimensions pharaoniques sont en chantier aux quatre coins du monde. Comment rendre ces structures gigantesques résistantes aux contraintes physiques et pérennes en toutes circonstances ? Zoom sur 7 projets en cours parmi les plus impressionnants. Par Maïa Wasserman

© Shutterstock ; NCA/Snøhetta ; HZMP ; M. Jourdier/AFP ; Zaha Hadid Architects

• Grand Inga

CES chantiers qui battent tous les records

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TECHNO

Des structures qui parient sur la démesure 1 La Jeddah Tower

Un kilomètre sur la toise ! ■ Lieu : Jeddah (Arabie saoudite) ■ État d’avancement : en cours, achèvement prévu fin 2019

Dans la course à la tour la plus haute, le record n’est pas encore atteint. Loin de là. Un nouveau gratte-ciel, la Jeddah Tower, est en cours de construction au bord de la mer Rouge, en Arabie saoudite. Une fois achevé, il tutoiera les nuages et s’élancera à 1 000 m de hauteur. Il deviendra alors le plus grand édifice au monde, devant le record actuel, la tour Burj Khalifa (Émirats arabes unis) et ses 828 m. Démarré en juin 2013, ce chantier, mené par le cabinet de l’architecte américain Adrian Smith, a dû s’exposer à une avalanche de défis. D’abord, comment construire des fondations qui accrochent bien la structure dans le sol, sachant que le terrain est formé de sable, de calcaire corallien fissuré et de gravier ? Les constructeurs ont choisi de planter 270 piliers en acier et béton très résistants à la compression, mesurant de 50 à 100 m de longueur, qui s’appuient sur la première sous-couche suffisamment stable rencontrée en partant de la surface. Ensuite, quelle forme et quels matériaux adopter ? La base de la tour s’approche d’un « Y » horizontal, avec une colonne vertébrale au centre et une structure de plus en plus effilée qui évite d’avoir trop de prise au vent. Le tout est érigé à partir de matériaux classiques (acier et béton), qui sont bien maîtrisés par les entreprises de construction. Enfin, comment édifier la structure à une telle hauteur ? Cette fois, les ouvriers ont eu recours à l’assemblage de pièces détachées et à l’utilisation de montecharges et grues télescopiques. Si tout va bien, la Jeddah Tower devrait être achevée d’ici quelques mois. Elle pourra alors accueillir ses premiers occupants au sein de bureaux, logements et hôtels, répartis sur 167 étages et accessibles par 59 ascenseurs. Gare au vertige !

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© Adrian Smith & Gordon Gill architecture ; Zaha Hadid Architects

2 L’aéroport international de Pékin Une « étoile de terre » hors norme

■ Lieu : Daxing (au sud de Pékin, Chine) ■ État d’avancement : en cours, achèvement prévu en octobre 2019

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 700 000 m2 de surface, 72 millions de voyageurs et 630 000 vols par an à partir de 2025, puis 100 millions de touristes et 4 millions de tonnes de marchandises transportés à terme. Le nouvel aéroport de Pékin, imaginé par le célèbre cabinet d’architectes fondé par l’Irako-Britannique Zaha Hadid, joue la démesure. Situé à 45 km au sud de la capitale chinoise, il prétend devenir le plus grand terminal au monde. Sa structure principale, dont la construction a été lancée en 2015, a été conçue en forme d’étoile de mer pour minimiser les distances entre les zones d’enregistrement et celles des départs (600 m maximum). Pour la déployer, il aura fallu pas moins de 1,6 million de mètres cubes de béton et 52 000 tonnes d’acier. Un chantier titanesque qui devrait accueillir au final sept pistes de décollage et absorber ainsi le trafic aérien en pleine croissance dans le pays.

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TECHNO

Des structures qui transpercent la Terre 3 Le réseau Elizabeth Line Un mastodonte sous la ville

Guidage par laser

Pour que le tunnelier suive la bonne direction sous terre, il est guidé par un système de laser (dans la cabine de pilotage, non représentée sur ce schéma) qui lui permet d’arriver à moins de 1 mm de la destination visée.

Pose des parois

Au fur et à mesure que le creusement s’effectue, le tunnelier installe des segments en béton en forme d’anneau pour former les parois du tunnel.

■ Lieu : Londres (Angleterre) ■ État d’avancement : en cours,

achèvement prévu à l’automne 2019

Il aura fallu dix ans de chantier pour arriver à ce résultat… La ville de Londres est en train de s’équiper d’un nouveau système de transport ferroviaire qui va permettre de relier plus facilement les villes de grande banlieue (Reading, Shenfield…) au centre de la capitale. Objectif : ajouter 10 % de capacité ferroviaire et transporter ainsi 1,5 million de personnes supplémentaires sur ces trajets. À terme, plus de 200 millions de passagers devraient utiliser le réseau chaque année. Selon Simon Wright, directeur général de Crossrail, à l’origine de ce projet, « la ligne Elizabeth est l’un des projets d’infrastructure les plus complexes et les plus ambitieux jamais entrepris au Royaume-Uni ». De fait, l’une des grosses difficultés a été de réussir à creuser 21 km de tunnel sous la ville de Londres, sans endommager les bâtiments au-dessus, ni les fondations, ni les métros voisins existants. Pour ce faire, huit tunneliers ont creusé vingt-quatre heures sur vingt-quatre pendant trois ans. En tout, il aura fallu assembler 200 000 segments de béton pour fabriquer le tunnel.

15 000 hommes

Tête de forage

La roue de coupe, sur la face avant du tunnelier, tourne lentement. Elle contient des mollettes qui vont faire éclater la roche.

4 Le tunnel de Boring Company Une route sous les routes

■ Lieu : Los Angeles (États-Unis) ■ État d’avancement : inauguré en décembre 2018 Pour éviter les bouchons urbains, pourquoi ne pas creuser des routes souterraines et déployer ainsi un réseau autoroutier en 3D ! C’est en partant de cette idée étonnante qu’Elon Musk, le célèbre patron de Tesla et SpaceX, a décrit pour la première fois en 2016 le principe d’un tunnel pour voitures qui pourraient circuler en dessous des grandes métropoles. L’une des plus grandes performances de ce projet tient essentiellement à sa rapidité, puisqu’à peine deux ans plus tard, un premier tronçon voyait déjà le jour. Pour parvenir à tenir de tels délais, la structure du tunnel a été construite avec un diamètre de 4 m seulement (contre 8 m la plupart du temps), ce qui a permis d’alléger et de raccourcir la durée du chantier.

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Extraction des décombres

Les gravats (craie, argile…) passent derrière la roue et sont acheminés par une vis d’extraction vers l’arrière du tunnelier.

et femmes travaillent sur ce  chantier Propulsion

L’avancée du tunnelier est assurée par des pistons qui exercent une pression vers l’avant sur la roue de coupe. On les appelle des vérins de poussée.

5 le Stad Skipstunnel Analyse des débris

Les décombres sont analysés pour déterminer leur composition et adapter si besoin la tête de forage.

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L’hybride mi-terre, mi-mer ■ Lieu : presqu’île de Stad (Norvège) ■ État d’avancement : début de la construction prévu en 2021, fin en 2025

Comment faciliter les conditions de transport pour les bateaux, dans les zones régulièrement balayées par les tempêtes ? En aménageant un tunnel sous une montagne qui raccourcit

© John Zammit ; Getty ; Crossrail Ltd ; Illustrations by Adrian Mann & Ed Crooks ; Boring Company ; NCA/Snøhetta

tunneliers de  140  m de longueur sont nécessaires

et sécurise les trajets les plus difficiles. Voici la motivation qui a fait naître ce projet de structure maritime inédite. Étendu sur 1,7 km, large de 26,5 m et haut de 37 m, ce tunnel unique au monde sera destiné aux navires transportant marchandises et passagers. Pour le construire, le principal défi technique sera de percer le tunnel, par forage et dynamitage, ce qui devrait nécessiter l’extraction de 3 millions de mètres cubes de roche ! À terme, 120 bateaux pourront circuler chaque jour. Reste que le financement du projet par le parlement norvégien n’a pas encore été acté…

1Entrée

Huit à seize passagers embarquent dans des navettes dédiées, entrant dans le tunnel par différents points répartis sur le réseau en surface. Des véhicules particuliers peuvent aussi y accéder.

2Descente

En se positionnant au-dessus de ces points d’entrée qui servent d’ascenseurs verticaux, les wagons ou voitures descendent de manière automatisée dans le tunnel.

3Circulation souterraine 4 Circuits en préparation Arrivés dans le tunnel, ils glissent sur des tapis roulants à la vitesse maximale de 200 km/h, avant de ressortir en surface plus loin, par un autre ascenseur.

Un premier tunnel vient d’être inauguré à Los Angeles. Un projet de second circuit construit par Elon Musk pour la ville californienne a été annulé, mais d’autres sont envisagés, à Chicago notamment.

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TECHNO

Des structures qui se jouent de l’eau

6 Le pont Hong KongZHUHAI-Macao Le géant qui enjambe un estuaire

■ Lieu : entre Hong Kong et Macao (Chine) ■ État d’avancement : mis en service en octobre 2018 Les dimensions de ce chantier sont tout simplement époustouflantes : 55 km de longueur, dont 22,9 km de pont à haubans, 6,7 km de tunnels sous-marins entrecoupés d’îles artificielles… Cette structure qui relie Hong Kong à Macao est désormais la plus longue autoroute maritime du monde. Installé sur le delta de la rivière des Perles, l’ensemble aura nécessité l’utilisation de béton précontraint et de 420 000 t d’acier, l’équivalent de 60 tours Eiffel !

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Il faut dire que cet ouvrage a dû être conçu pour résister aux typhons et aux tremblements de terre locaux. Autre contrainte de taille : il devait s’intégrer à un site où le trafic maritime et aérien s’avère particulièrement intense. Ce chantier considérable aura mis, au total, neuf ans à voir le jour, pour la bagatelle de 20 milliards d’euros. Mais à ce prix-là, 40 000 usagers ont vu leur temps de trajet quotidien passer de trois heures à trente minutes.

Les plus gros ratés architecturaux Kemper Arena (États-Unis)

Cette salle de sport, construite en 1974 à Kansas City (Missouri), était censée posséder un toit très efficace en matière d’évacuation de l’eau. Sauf qu’en 1979, lorsqu’une tempête s’abattit sur la ville, une grande partie de sa structure s’effondra littéralement sous le poids de la pluie.

© Getty ; AFP ; TPG ; Wiki ; Shutterstock ; AP/SIPA ; VCG ; Garrett Fuller ; Tony Hisgett ; Wknight94 ; HZMB ; M. Jourdier/AFP ; Mirrorpix/Sipa

Tour Talkie Walkie (Angleterre)

7 Le barrage Grand Inga La mégacentrale hydroélectrique

■ Lieu : ouest de la République démocratique du Congo ■ État d’avancement : à l’étude Trente-neuf mille mégawatts : c’est la puissance que vise l’installation de ce barrage gigantesque, à l’étude sur le fleuve Congo. Soit autant que 40 centrales nucléaires ! Sur place, deux barrages sont déjà installés depuis les années 1970 et 1980, sous les noms d’Inga 1 et 2. Mais leur production électrique ne suffit plus. Pour faire face aux besoins énergétiques croissants en République démocratique du Congo, mais aussi dans les pays africains voisins, un nouveau projet en plusieurs phases est donc envisagé. Il consisterait à construire un troisième barrage, Inga 3, suivi par plusieurs autres

qui entraveraient le chemin du fleuve dont le débit est hallucinant (40 000 m3 par seconde en moyenne, soit le deuxième plus important au monde, derrière l’Amazone). Si le projet se concrétise, cette installation produira le double de la puissance du barrage des Trois-Gorges, en Chine. Le Grand Inga deviendrait alors la plus grande installation de barrages au monde. Reste à prendre en compte les impacts environnementaux, qui risquent d’être lourds, et les conséquences pour la population locale qui, par endroits, devra quitter les lieux car la région sera inondée. Des discussions sont en cours.

En 2014, la forme incurvée et vitrée de cette tour était censée la démarquer des autres constructions de Londres… sauf qu’elle lui a joué des tours. Par endroits, elle a créé des zones d’ombre gênantes dans le voisinage tandis qu’en d’autres lieux, elle a tellement concentré la lumière du soleil qu’elle a brûlé les voitures et les façades proches ! Un journaliste a même réussi à faire cuire un œuf dans la rue grâce à cette chaleur !

Pont de Tacoma (États-Unis)

Cette construction est rentrée dans les annales par ses déboires. Édifiée en 1940, elle reliait deux villes de l’État de Washington. Mais quelques mois après son inauguration, la structure se mit à osciller avec ampleur sous l’effet du vent et finit par s’écrouler totalement. Longtemps cité comme étant lié à un phénomène de résonance, cet accident serait en fait dû à un couplage de torsion et de vibration répété.

Opéra Bastille (France)

Inaugurée en 1989, la façade de ce bâtiment avant-gardiste était recouverte de 28 000 m2 de panneaux de pierre. Le hic, c’est qu’aucun ne tenait bien en place car le matériau était trop fragile. Pendant quatorze ans, il a donc fallu tendre des filets le long des murs pour éviter toute chute sur les passants. Aujourd’hui, tous ces panneaux ont été remplacés.

Pont Morandi (Italie)

Le 14 août 2018, le viaduc autoroutier de Gênes s’écroulait subitement. Bilan : 43 morts. Quelques mois plus tard, les explications sur cet accident ne sont pas encore bien établies, mais une particularité architecturale est souvent évoquée. Construit en 1963, ce pont possédait des haubans en acier entouré de béton précontraint. Cette structure, peu utilisée sur ce type de construction, a pu se corroder au fil du temps et finir par casser. L’enquête est en cours.

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TwE C H N O

un scanner

Cette image au scanner laisse apparaître les vertèbres et les reins en tons clairs.

Par Denis Delbecq

À

la fin du XIXe siècle, la découverte des rayons X par l’Allemand Wilhelm Röntgen révolutionne la médecine. En effet, quand ces rayons très énergétiques traversent le corps, ils sont absorbés de manière différente suivant la densité des tissus internes, produisant des zones d’ombre variées sur une surface sensible qui capte ces rayons. Pour la première fois, les médecins peuvent voir l’intérieur du corps de leurs patients sans devoir les opérer. Mais pour les spécialistes, ce n’est pas suffisant. Car cette méthode (la radio aux rayons X) a un défaut : si elle livre une image instantanée de l’organisme, les organes y sont empilés les uns sur les autres. Ce qui ne facilite pas l’analyse des détails.

Détecteur rotatif

Il tourne autour du patient, pour voir son corps sous différents angles.

CONTRASTE.

En 1972, le Britannique Godfrey Hounsfield trouve la parade en fabriquant un ordinateur qui prend des clichés radiographiques d’un objet sous une multitude d’angles – cette fois en « tranches » – avant de reconstruire une image de cet objet. Il vient d’inventer un nouveau procédé : la tomographie assistée par ordinateur, ou scanner. Une nouvelle révolution pour la médecine. Car le scanner détaille le corps sous forme de coupes de 1 à 10 mm d’épaisseur, ce qui permet de distinguer nettement les os, les organes, les vaisseaux sanguins… Pendant l’examen, une table mobile fait glisser le patient dans l’anneau qui porte la source de rayons X ; l’ordinateur enregistre tous les clichés, puis les assemble pour montrer les organes internes en relief. Le résultat est une image en haute résolution de l’intérieur du corps. Les contours des organes sont beaucoup plus nets que dans les images de simples radiographies. Leur vision en 3D est utile pour révéler des anomalies, comme des tumeurs cancéreuses. Les médecins peuvent même améliorer le contraste (la différence entre le clair et le sombre) en injectant

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Unités de refroidissement

Des tubes remplis de liquide permettent d’évacuer la chaleur produite par la source de rayons X.

un produit dans le sang du patient. L’iode permet ainsi de visualiser la forme des vaisseaux sanguins et de déceler la présence de caillots qui gênent la circulation du sang, tandis que le baryum livre des images contrastées du système digestif. Certes, le scanner émet des rayonnements ionisants qui peuvent nuire aux cellules, mais ses avantages dépassent largement ses inconvénients.

ÉCLAIRER LES ORGANES DE L’INTÉRIEUR Pour étudier des organes spécifiques, les médecins utilisent parfois des techniques de médecine dite nucléaire (qui utilise des radioéléments). Cela consiste à injecter, faire inhaler ou avaler au patient une petite quantité de matière active, choisie pour « mettre en lumière» un tissu précis. Quand il faut, par exemple, mettre en évidence les vaisseaux sanguins et détecter des caillots qui bloquent la circulation, on utilise une machine de tomographie par émission de photon unique (SPECT). On injecte au patient des atomes radioactifs qui émettent des rayons gamma (constitués de photons). Une caméra extérieure qui détecte

ces rayons peut alors « voir » les vaisseaux sanguins. Une autre option est la tomographie par émission de positons (PET). Elle utilise des substances radioactives qui émettent, cette fois, des positons (des particules identiques aux électrons, mais de charge électrique inverse). Quand un positon rencontre un électron, ces deux particules s’annihilent en créant deux photons gamma qui bombardent d’énergie les détecteurs. Des substances radioactives conçues pour se fixer au sucre peuvent ainsi éclairer les cellules qui utilisent beaucoup d’énergie (du sucre), telles que les zones actives du cerveau ou des tumeurs cancéreuses (photo ci-contre).

Ventilation

Pour éviter une surchauffe de l’appareil, un ventilateur évacue la chaleur captée par les unités de refroidissement.

Portique

Moteur

Un dispositif motorisé fait tourner le portique et glisser la table.

Table

Elle coulisse à l’intérieur de l’anneau pour produire les différentes vues par « tranches » successives.

Écran

L’ordinateur montre des vues du corps par « tranches » qui sont affichées sur le moniteur de contrôle.

© Getty ; Illustration by Adrian Mann

C’est le nom donné à l’ouverture circulaire de la machine.

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HISTOIR E

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Les secrets de la

tour de Londres À la fois forteresse, prison, château royal et musée, cet édifice, qui glorifia la puissance des Normands il y a près de 1 000 ans, n’a jamais cessé d’être un fleuron de l’histoire britannique. Par Marie Billon

d’un château, dont les cimes atteignent 27 m de hauteur, et non simplement d’une tour – n’est pas une prison ordinaire. Dès la pose de sa première pierre, au début des années 1070 (alors que les constructions de l’époque sont en bois), le message est clair. Les Normands, qui viennent d’envahir le pays (Guillaume le Conquérant a vaincu le roi Harold II à la bataille d’Hastings en 1066), sont là pour rester, n’en déplaise aux Saxons, et en particulier aux riches Londoniens. Cette forteresse est là pour le prouver.

REFUGE. Elle ne cessera de s’agrandir jusqu’au XIXe siècle, devenant peu à peu un complexe de petits palais. Au Moyen Âge, elle n’est pas encore très confortable, mais elle sert déjà de place forte pour le pouvoir royal. C’est d’ailleurs dans ses murs que le jeune Richard II se réfugiera en 1381 lors de la Révolte des paysans.

© Getty / Future Owns

N

ous sommes un soir de l’an 1360. Un grand banquet se prépare à la tour de Londres. Les mets les plus luxueux, chevreuil ou gibier à plumes, mijotent… Il faut dire qu’il y aura deux têtes couronnées à ce festin, les rois d’Angleterre et de France, Édouard III et Jean II. L’assemblée est encore loin d’être ivre, et pourtant le monde tourne déjà à l’envers : c’est le prisonnier qui invite ! Jean II a en effet été capturé par les Anglais en 1356 à la bataille de Poitiers. Quatre ans plus tard, après la signature du traité de Brétigny, il se prépare à être libéré. C’est pour remercier ses geôliers, qui l’ont traité comme un invité de marque, qu’il organise cette fête. Car il ne faut pas imaginer Jean II enchaîné dans un cachot… mais plutôt continuant de gérer les affaires de son royaume à distance, depuis la cour de la forteresse. C’est que la tour de Londres – appellation trompeuse, car il s’agit

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HISTOIRE Dès sa construction achevée, en 1100, la Grande Tour (appelée aujourd’hui Tour blanche, voir plan pp. 78-79) fait aussi office de prison réservée à ceux qui déplaisent à Sa Majesté. En 1409, l’épouse, deux filles et trois petites-filles du rebelle gallois Owen Glendower y sont ainsi emprisonnées. Leur seul crime est d’être parentes d’un homme qui remet l’autorité du souverain en cause. Aucune ne survivra. Plusieurs rois sont aussi retenus ici après avoir été renversés, dont Henri VI, qui y sera tué pendant la nuit sur les ordres d’Édouard IV en 1471. Sept ans plus tard, le roi fera aussi exécuter son propre frère en le noyant dans une barrique de vin au sein de la forteresse, dans la tour Bowyer. Henri VIII enverra nombre de ses anciens proches à la tour de Londres. Deux de ses reines, Anne Boleyn et Catherine Howard, accusées d’adultère, y seront décapitées. Le fameux roi aux huit épouses sera aussi le seul à autoriser, en 1546, la torture d’une femme, Anne Askew, condamnée pour hérésie. Mais contrairement à ce que laisse penser la légende, les registres indiquent que « peu » de prisonniers (81 sur plusieurs centaines) ont finalement été torturés à la tour de Londres.

LIBERTÉS. Au contraire, les prisonniers de haut rang bénéficiaient même de certaines libertés ! En 1356, le roi de France Jean II s’installe ainsi à la tour avec cinq chariots remplis de ses effets personnels. Certains détenus se font préparer leurs repas par leur propre chef. L’explorateur et courtisan Sir Walter Raleigh, accusé de conspiration contre le roi Jacques Ier et détenu de 1604 à 1616, demande que sa cellule soit séparée en deux pour que sa famille puisse loger avec lui, et qu’il ait un espace pour travailler. On l’autorise aussi à garder avec lui trois serviteurs. Le comte de Southampton, quant à lui, se fait peindre le portrait, en compagnie de son chat, en prison en 1603. Les détenus de renom ont également le droit de se promener dans l’enceinte de la forteresse. Au début du XVIIe siècle, un prisonnier profitera tant de cette liberté que l’allée reliant la tour Martin, où il est détenu, à la tour Brick est renommée « chemin de Monsieur le comte de Northumberland » en sa mémoire. Le temps passé derrière les barreaux n’est cependant pas dévolu qu’à la frivolité. De nombreux captifs écrivent leurs mémoires ou des poèmes. Le comte 74 | TOUT COMPRENDRE

Les plus célèbres prisonniers

les princes de la tour

Anne Boleyn

(19 mai 1483 / date inconnue)

(2 mai / 19 mai 1536)

En 1483, à la mort de son père Édouard IV, Édouard V doit lui succéder à l’âge de 12 ans. Emmené par son oncle Richard à la Tour pour préparer son couronnement, il y est rejoint par son petit frère le duc d’York. Là, leur oncle les déclare illégitimes et s’empare de la couronne ! Les deux princes disparaissent quelques jours plus tard. Ont-ils été assassinés ? En 1675, deux corps d’enfants sont découverts sous les escaliers de la Tour blanche. Aujourd’hui, seuls des tests ADN permettraient de confirmer leur identité, mais la reine Élisabeth II n’a pas donné son autorisation.

Après trois ans de mariage, Anne Boleyn n’a donné naissance qu’à une fille. Henri VIII perd patience. Il récuse celle pour qui il a divorcé de sa première épouse, Catherine d’Aragon, l’accuse de sorcellerie, d’adultère et d’inceste. Emprisonnée puis jugée à la tour de Londres, Anne est décapitée par un bourreau venu de France. Elle sera suivie par la cinquième épouse d’Henri VIII, Catherine Howard, exécutée six ans plus tard. Sa fille Élisabeth sera emprisonnée dans la Tour par sa demi-sœur (Marie Tudor), mais en ressortira vivante et deviendra reine en 1558.

Le premier zoo de Londres

Lady Jane Grey

Guy Fawkes

Rudolf Hess

(19 juil. 1553 / 12 fév. 1554)

(5 nov. 1605 / 31 janv. 1606)

(17 mai / 20 mai 1941)

Jane n’a que 16 ans quand elle accède au trône, le 10 juillet 1553. Très vite, celle qu’on va surnommer « la reine de neuf jours » en raison de la brièveté de son règne est déchue sans même avoir eu le temps d’être couronnée. Renversée par sa cousine catholique Marie Tudor, alias « Marie la Sanglante », elle est emprisonnée dans la tour de Londres. Marie rechigne d’abord à exécuter sa jeune parente. Une rébellion fomentée par le père de Jane pousse finalement la reine à signer son arrêt de mort. La jeune fille est décapitée, elle n’a pas encore 17 ans.

Il était l’un des principaux organisateurs du complot catholique appelé la « Conspiration des poudres ». Guy Fawkes voulait faire exploser (au sens propre) le Parlement avec le roi protestant Jacques Ier et sa famille à l’intérieur. Mais son plan est découvert. Il est torturé avant d’être condamné à être pendu, écartelé et décapité, un sort d’ordinaire réservé aux pires traîtres. Par « chance », en montant sur l’échafaud, il saute ou trébuche, et meurt en se brisant le cou.

Quand l’avion transportant le bras droit d’Adolf Hitler s’écrase en Écosse le 10 mai 1941, les Britanniques l’emprisonnent rapidement à la tour de Londres. Rudolf Hess, qui prétend être venu au Royaume-Uni pour négocier la paix, passera quatre jours dans la forteresse avant d’être transféré dans le sud de l’Angleterre, puis en Allemagne (à Berlin-Ouest) après la guerre, pour y purger sa peine (après le jugement des ex-dirigeants de l’Allemagne nazie).

© Shutterstock ; Getty ; Wiki ; City of London / Heritage Images ; Future Owns

Pendant des siècles, on a pu entendre rugir depuis la tour de Londres… Dès le XIIIe siècle, le lieu abritait en effet une ménagerie royale. En 1235, l’empereur des Romains Frédéric II offrit à Henri III trois « léopards » (qui auraient en fait été des lions). Ce sont d’ailleurs eux qui ornent encore le maillot de l’équipe de foot d’Angleterre. En 1252, le souverain britannique reçut, de la part du roi de Norvège, un ours polaire. L’animal était autorisé à aller nager et pêcher dans la Tamise. En 1255, le roi Louis IX de France offrit même un éléphant à son cousin d’Angleterre. La ménagerie grandit pendant près de huit siècles. Autant de curiosités pour les Londoniens qui se rendaient à la Tour parfois à leurs risques et périls, car si les gardes les laissaient entrer contre quelques piécettes, ils n’assuraient pas leur sécurité. Après plusieurs incidents, en 1835, le roi Guillaume III préféra fermer la ménagerie, et quelque 150 animaux furent alors transférés à Regent’s Park, où se trouve aujourd’hui le zoo de Londres.

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HISTOIRE d’Arundel, qui deviendra saint Philippe Howard, emprisonné de 1585 à 1595 en raison de ses convictions catholiques, rédige ainsi plusieurs traités religieux depuis son cachot. Tout cela ne plaît pas à tout le monde. Au XVIIe siècle, le roi Jacques Ier se plaint des « anarchiques libertés de la Tour ». D’autant plus que certains prisonniers, tel Sir Walter Raleigh, sont si célèbres qu’ils attirent les curieux. On vient visiter la forteresse en espérant voir un comte apparaître à la fenêtre !

CLÉS.

La tour de Londres a eu bien d’autres fonctions au fil des siècles. Dès le Moyen Âge, c’est ici que les preux chevaliers viennent pour se préparer à combattre lors des joutes festives. Si la cour n’est pas toujours là, une partie du gouvernement y réside à demeure. C’est aussi une base militaire où vivent des garnisons de soldats et où sont fabriquées et stockées des centaines d’armes de 1066 à 1850. L’hôtel des Monnaies s’y installe en 1279, rejoignant le bureau des Archives royales, installé depuis le début du XIIIe siècle. En multipliant ses fonctions administratives et en mettant l’accent sur le tourisme à partir du XIXe siècle, la tour de Londres perd peu à peu son identité de place forte – bien qu’elle demeure une caserne militaire jusque durant la Seconde Guerre mondiale. Elle accueille aujourd’hui près de 3 millions de visiteurs par an. Elle a conservé certaines traditions, dont la Cérémonie des clés. Tous les soirs à la fermeture, depuis plus de 700 ans, un garde crie : « Halte, qui va là ? » quand passe le gardien des clés, qui répond : « Les clés de la reine Élisabeth ». « Tout va bien alors », conclut la sentinelle, avant que le gardien ferme les portes et remette les clés au gouverneur de la Tour pour la nuit.

La porte des Traîtres est celle par laquelle entraient les prisonniers.

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Les gardes de la tour de Londres Uniforme quotidien

Dessiné sous la reine Victoria, il porte les initiales du souverain actuel.

Gardes

Ces militaires de carrière sont appelés « hallebardiers de la garde royale » et surnommés « beefeaters » depuis le XVIIe siècle, parce que leur ration quotidienne contenait beaucoup de viande rouge.

Uniforme de cérémonie

Il date de 1549 et n’est désormais porté qu’en présence du monarque ou lors de grandes occasions.

Les évadés

Les joyaux de la Couronne La tour de Londres est aussi le lieu où sont conservés sous haute protection les couronnes, épées et sceptres utilisés lors des couronnements des rois et reines d’Angleterre depuis au moins le XIIIe siècle. Tous ne sont cependant pas d’origine. La plupart d’entre eux furent détruits après le renversement de la monarchie en 1649. À la Restauration, en 1660, Charles II en fit façonner de nouveaux sur le modèle des joyaux perdus. Neuf ans plus tard, le roi laissa ses sujets admirer, et même toucher, les « Regalia » (comme on les appelle aussi), installés dans la tour Martin sous une surveillance minimale. La sécurité a, depuis, été largement renforcée. Et pour cause : avec ses plus de 530 carats, le diamant Cullinan I, qui sertit le sceptre royal, est le plus gros diamant taillé au monde. La couronne de saint Édouard, avec laquelle la monarque actuelle a été sacrée reine en 1953, contient pas moins de 1 868 diamants, 17 saphirs, 11 émeraudes, 5 rubis et 237 perles ! Après la cérémonie à l’abbaye de Westminster,

la couronne et les autres insignes royaux ont été ramenés dans la caserne Waterloo, au centre de la forteresse. Désormais, des centaines de gens font la queue chaque jour pour les observer dans la petite pièce sombre aux conditions de sécurité optimales où ces merveilles sont exposées.

Rainulf Flambard est célèbre pour avoir été le tout premier prisonnier de la tour de Londres… et le premier à s’en être évadé ! Puissant ministre du roi Guillaume II, il vit sa carrière, mais surtout sa liberté, sérieusement compromises à la mort de ce dernier, en 1100. Le nouveau monarque, Henri Ier, l’accusa de détournement de fonds et l’emprisonna à la tour. En 1101, assisté par des amis qui introduisirent une corde dans sa prison en la cachant dans une jarre de vin, Rainulf Flambard saoula ses gardes puis s’enfuit en descendant de la tour à l’aide de la corde. Au cours des siècles suivants, seuls quelques rares prisonniers réussirent leur évasion. Parmi eux, le comte de Clancarty, en 1694, qui parvint à s’enfuir par la fenêtre après avoir placé un mannequin portant ses habits sous les draps pour tromper les gardes. Ou les comtes de Winton et de Nithsdale, en 1716, qui s’évadèrent, le premier caché dans un panier, le second aidé par son épouse. Venue lui rendre visite avec sa logeuse, elle habilla son mari avec les vêtements de cette dernière, cachant son visage derrière un mouchoir. Il passa ainsi sous le nez des gardes incognito !

Château hanté et corbeaux protecteurs

© Shutterstock ; Getty

La légende veut que si les six corbeaux locataires du château s’envolaient, le royaume s’effondrerait. Aujourd’hui, ils sont sept (dont un « remplaçant »), chouchoutés par les gardes qui les nourrissent de biscuits imbibés de sang. Les rapaces ne se seraient en fait installés au château qu’au XIXe siècle. Et le pays ne s’est pas effondré quand tous les volatiles, sauf un, ont fui la tour lors des bombardements de la Seconde Guerre mondiale… Une autre légende veut que le château soit hanté – un classique ! En 1864, un soldat accusé de s’être endormi pendant sa garde prétendit être en état de choc après avoir aperçu le fantôme de la reine décapitée Anne Boleyn. Il aurait tenté en vain de la repousser avec son arme avant de s’évanouir. Le spectre aurait été revu plusieurs fois après cet épisode.

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zoom Sur la forteresse

Tour blanche

C’est le premier édifice de la forteresse. Elle s’appelait la Grande Tour avant que le roi Henri III ne la fasse blanchir à la chaux en 1241.

Chapelle royale de Saint-Pierre-aux-Liens C’est ici que les corps des condamnés étaient enterrés ; y reposent notamment les restes des reines Anne Boleyn et Catherine Howard.

Pelouse du château

C’est ici que les condamnés à mort de très haut rang étaient exécutés. Les autres passaient de vie à trépas à l’extérieur de la forteresse, sur Tower Hill (« la colline de la Tour »).

Tour de Wakefield

Elle a été construite pendant les travaux d’agrandissement d’Henri III au XIIIe siècle. Les instruments de torture y sont exposés aujourd’hui.

Maison de la reine

Cette maison à colombages, typique de l’architecture de style Tudor, change de nom en fonction du sexe du souverain.

Porte des traîtres

Tour Saint-Thomas

Édifiée pour permettre au roi Édouard Ier d’arriver par bateau, elle est ensuite devenue l’endroit par lequel les détenus arrivaient.

Construite au XIIIe siècle pour y installer les appartements du roi Édouard III, elle bénéficie d’une vue imprenable sur la Tamise.

Les dates clés 1070

1241

1381

1669

1675

1696

1835

1913

Après la bataille Premiers grands Les rebelles Durant le règne Deux corps Le scientifique La ménagerie Une suffragette d’Hastings, travaux depuis de la Révolte de Charles II, d’enfants sont Isaac Newton est royale est fermée brise la vitre qui Guillaume la construction. des paysans on pouvait déjà retrouvés dans nommé gardien après plusieurs protège les le Conquérant Henri III fait parviennent visiter la Tour, la Tour blanche. de l’hôtel des incidents, et joyaux de la entame la blanchir la à pénétrer dans et même toucher Le pays est Monnaies. la plupart des Couronne pour construction Grande Tour, la forteresse les joyaux persuadé d’avoir Il contribuera animaux sont protester contre d’une forteresse qui devient la en bénéficiant de la Couronne. résolu le mystère à envoyer transportés dans le refus du pour intimider Tour blanche. de la sympathie des princes plusieurs ce qui deviendra gouvernement et soumettre des gardes. disparus en 1483. faux-monnayeurs le zoo d’accorder les Anglo-Saxons. à la potence. de Londres. le droit de vote aux femmes.

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1952

Parmi les derniers prisonniers de la tour de Londres figurent les jumeaux Kray, célèbres gangsters, qui y sont incarcérés provisoirement.

Tour Bowyer

Édifiée entre 1238 et 1241 par le roi Henri III, elle a été reconstruite au XIXe siècle suite à un incendie qui l’avait partiellement détruite.

Caserne Waterloo

Construite par le duc de Wellington et nommée après la fameuse bataille des guerres napoléoniennes, elle abrite aujourd’hui les joyaux de la Couronne.

Tour Martin

Construite au XIIIe siècle, c’est là que les visiteurs venaient voir les joyaux de la Couronne quand le colonel Blood tenta de les dérober en 1671.

Tour Brick

C’est une tour assez simple, que traverse le chemin de ronde. Le comte de Northumberland, emprisonné dans la tour Martin, avait le droit de s’y promener.

Elle faisait partie des logements de l’épouse du roi Henri III et servait aussi à renforcer la défense.

© Adrian Mann / Future Owns ; Alamy

Tour de la Lanterne

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I L S O N T M A R Q U É L’ H I S T O I R E

Jeannette Guyot

gouvernement français à Vichy. En 1939, au début de la guerre, la jeune fille a 21 ans et elle s’engage tout de suite dans la Résistance, tout comme ses parents. Au sein d’un réseau baptisé Amarante, elle utilise son laissez-passer pour aider des agents ou des personnes en danger à gagner la zone libre. En août 1941, le colonel Rémy, chef d’un autre réseau basé à Paris, lui demande en plus de faire passer des informations. Elle devient alors agent de liaison. Mais elle est bientôt arrêtée et reste trois mois aux mains de la Gestapo (la police nazie). Jeannette tient bon et ne parle pas. Elle sort de sa détention privée de son laissez-passer, mais continue à aider nombre de personnes à passer en zone libre.

Résistante à 21 ans, décorée par la France, le Royaume-Uni et les États-Unis pour son courage, Jeannette Guyot, née il y a 100 ans, est tombée dans l’oubli malgré son histoire exceptionnelle. Par Sophie Noucher

PLAN SUSSEX. À l’été 1942, le réseau

L

ucie Aubrac, Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz… Ces femmes font partie des plus célèbres Françaises de la Résistance. Il en est une beaucoup moins connue : Jeannette Guyot. Peut-être est-ce parce qu’elle n’a jamais témoigné (ni au cours d’un procès, ni dans des livres ou conférences) qu’aucune rue ne porte son nom ? Pourtant, elle a été si courageuse

qu’elle est la seule Française à avoir reçu la « Distinguished Service Cross », une haute distinction américaine, pour son « héroïsme extraordinaire ». Jeannette est née en 1919 d’un père négociant en bois et d’une mère couturière. La famille vit dans l’Est, à Chalon-surSaône, près de la ligne de démarcation entre la zone occupée par les Allemands et la zone libre administrée par le

est trahi. Jeannette s’enfuit à Lyon où elle en rejoint un autre, appelé Phratrie et dirigé par Jacques Robert, qui a été formé aux opérations spéciales en Angleterre. Sabotage, exfiltration d’aviateurs anglais… Ses compétences s’étendent. Bientôt menacée d’une seconde arrestation, elle est elle-même exfiltrée vers le RoyaumeUni par un avion de la Royal Air Force au printemps 1943. À Londres, elle retrouve le colonel Rémy et prend le pseudonyme de Jeannette Gauthier. Alors que le colonel la cantonne à des tâches administratives, elle insiste pour retourner sur le terrain. Il accepte alors

les dates clés

FÉVRIER 1919

Jeannette naît le 26 à  Chalon-sur-Saône, d’un père marchand et d’une mère couturière.

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1940-1941

Jeannette tient un rôle de « passeur » au  sein du réseau de résistants Amarante.

AOÛT 1941 Elle devient agent de liaison, sous les ordres du colonel Rémy.

FÉVRIER 1942

La Gestapo l’arrête et l’emprisonne trois mois à Chalon-sur-Saône et Autun (Saône-et-Loire).

JUIN 1942 Le réseau du colonel Rémy est trahi, elle s’enfuit à  Lyon.

CACHETTES. En février 1944, Jeannette

est prête, et c’est une véritable James Bond en jupons qui est parachutée à Loches, près de Tours. Sa mission : trouver des zones de largage et des cachettes pour une cinquantaine d’autres équipes. À Paris, elle cache un opérateur radio au Café de l’Électricité, dans le quartier des Grands Boulevards, puis effectue d’autres missions à partir d’un café qui héberge des Résistants, situé tout près d’un bureau de la Gestapo ! Le troquet sera d’ailleurs rebaptisé « Café des Sussex » après la guerre. Jeannette prend également des risques en transportant matériel et renseignements. Elle sait que si elle est découverte, l’attendent la torture et l’exécution. Dix agents du réseau perdront ainsi la vie. À la Libération, Jeannette continue à travailler dans le renseignement pendant quelques mois, mais elle finit par rentrer près de Chalon-sur-Saône où elle épouse un ancien agent, Marchel Gaucher, avec qui elle aura trois enfants. Elle retrouve sa mère, revenue vivante de la déportation, mais pas son père, mort en Allemagne. Du reste de sa vie, on ne sait rien : Jeannette n’a jamais témoigné ni écrit ses mémoires. À sa mort, il y a trois ans, c’est la page que lui a consacrée un journal anglais, le Daily Telegraph, qui a attiré l’attention de nombreux médias français sur cette héroïne, dont l’humilité et la discrétion ont égalé le courage.

MAI 1943

À nouveau menacée d’arrestation, elle doit quitter la France. Elle est exfiltrée à  Londres.

FÉVRIER 1944

5

Lors de la formation suivie en 1943-1944 par Jeannette Guyot à Praewood House, près de Londres, différentes techniques furent enseignées par des agents anglais et américains aux 120 futurs espions destinés à retourner en France.

1

Le sabotage

2

La conduite

3

Les grenades et explosifs en tous genres ne devaient plus avoir de  secret pour les résistants, qui  pouvaient être amenés à faire sauter des trains, des entrepôts ou des bureaux allemands.

Les agents devaient être capables de reconnaître tous les types de matériel pour les décrire (blindés, avions…), mais aussi savoir les piloter ! Conduire des camions, des cars ou des motos était au programme pour tous. Les futurs espions devaient aussi devenir des as de l’orientation et du balisage, pour sécuriser les atterrissages.

Le saut en parachute

En janvier 1944, Jeannette obtient le feu vert de ses supérieurs après seulement quelques jours de formation. Elle a appris à  sauter de jour comme de nuit, et le mois suivant, elle est parachutée sur Loches, près de Tours. Sa mission consistera notamment à  trouver des terrains discrets pour faire atterrir les autres agents du plan  Sussex.

4

L’espionnage

Les « radios » apprenaient à crypter ou  décrypter les messages, à partir de  postes encombrants cachés dans des  valises. Il fallait connaître l’alphabet morse et savoir habilement disposer les  longs fils d’antenne, afin d’obtenir une  réception correcte.

5

Le combat rapproché

Tous les agents suivaient un entraînement physique intensif : il fallait être capable de courir vite et longtemps, de savoir se défendre en cas d’agression, et éventuellement de tuer. Boxe, combat rapproché… À mains nues, les agents apprenaient par exemple à briser les  vertèbres cervicales de l’ennemi, sans  faire de bruit.

Elle est parachutée près de  Tours, après avoir suivi la formation du plan Sussex. La même année, ses parents sont arrêtés et déportés.

1944

À la Libération, Jeannette travaille quelques mois à la Direction générale des études et recherches.

JUIN 1945

Elle se retire à Sevrey, près de Chalon-surSaône, et épouse Marcel Gaucher, un ancien agent. Ils auront trois enfants.

AVRIL 2016

L’héroïne s’éteint à  l’âge de  97 ans. On apprend son décès par la presse britannique qui lui rend hommage.

© SSPL / Leemage ; Rue des Archives / Everett

de lui faire suivre, avec 120 volontaires, une formation aux techniques du renseignement militaire dispensée à Praewood House, près de Londres, par des instructeurs des services d’espionnage américain et anglais. Objectif : qu’ils soient capables de collecter un maximum d’informations sur les plans et mouvements de troupes allemandes, en vue du Débarquement en Normandie. C’est le « Plan Sussex ».

moyens de résister

TOUT COMPRENDRE | 81

QUESTIONS/RÉPONSES

Par Delphine Gaston-Sloan

ENVOYEZ-NOUS VOS QUESTIONS À :

Les menhirs datent-ils des Gaulois ? Question d’Hugues de V., Compiègne (Oise)

2, villa de Lourcine 75014 Paris

ou par mail à : toutcomprendre @fleuruspresse.com

Non. Ces mégalithes (« grandes pierres », en grec) datent en réalité de la préhistoire. Ce sont des blocs taillés ou bruts, plantés verticalement dans le sol, mesurant généralement de 3 à 10  m de hauteur, et souvent disposés en alignement ou en cercles. Le mot vient du breton men, pierre, et hir, long. C’est d’ailleurs en Bretagne qu’on trouve le plus vaste champ au monde, sur le site de Carnac (Morbihan). On y dénombre quelque 3 800 menhirs alignés sur 4  km, datant du Néolithique (4500 à 2000 av. J.-C.). Associer les menhirs aux Gaulois, qui peuplaient notre territoire du VIe au Ier  siècle avant notre ère, relève  donc  de  l’anachronisme. L’idée s’est pourtant ancrée dans les esprits avec la BD Astérix, les auteurs Goscinny et Uderzo ayant fait d’Obélix un tailleur livreur de menhirs. Une manière, sans doute, d’illustrer sa force vu  la  taille et le  poids de ces  énormes cailloux de granit !

Pourquoi les chevaux ne vomissent-ils jamais ? Question de Léonie L., Bastia (Haute-Corse) Cette incapacité est due à leur anatomie, et plus précisément au fonctionnement de leur cardia, orifice  doté d’un système musculaire particulièrement tonique situé à la jonction entre l’œsophage, très long (105  cm en moyenne), et l’estomac, de volume relativement restreint. Sa particularité ? Le cardia, également appelé sphincter œsophagien, ne s’ouvre que dans un sens. Quand le cheval ingère de la nourriture, celle-ci descend le long de l’œsophage. Lorsqu’elle atteint l’estomac, le cardia se desserre pour lui laisser le passage. Dès que les aliments sont  passés, il se contracte pour ne s’ouvrir qu’au  prochain « repas ». Ainsi, la circulation des aliments dans le tube digestif du  cheval n’est assurée que dans une seule direction : la descente ! Impossible donc pour  cet équidé de vomir. Cette spécificité anatomique n’est  d’ailleurs pas l’apanage du cheval. Le  cochon d’Inde, le lapin, le rat et la  souris sont dans le même cas. 82 | TOUT COMPRENDRE

D’où viennent les cernes ? Question de Dorian W., Fréjus (Var) Il suffit de se regarder certains jours dans une glace pour repérer ce premier signe manifeste de  fatigue. Mauvaise nuit, stress… autant de raisons de voir le dessous de l’œil prendre une vilaine couleur jaunâtre tirant sur le marron ou  un  bleu-gris aux reflets sombres. Plusieurs facteurs concourent à ces marques disgracieuses. Le manque de sommeil et l’épuisement ralentissent le flux de la lymphe (liquide biologique circulant dans les vaisseaux pour éliminer les déchets). La circulation veineuse, elle aussi, se fait moins bien. Dans les tissus mal drainés, les pigments qui donnent sa couleur au  sang s’accumulent. La  peau, très fine au niveau du contour de l’œil (entre 0,01 et 0,5 mm), les laisse voir par transparence. En dehors de causes héréditaires ou pathologiques avérées, ou d’une mauvaise hygiène de vie, quelques bonnes nuits de sommeil viennent à bout des cernes.

Quelle est la différence entre une grotte et un gouffre ? Ces deux termes désignent des cavités naturelles souterraines. C’est le ruissellement d’eau sur des terrains calcaires qui a ainsi creusé la roche, en dissolvant le carbonate de calcium qui la compose du  fait de son acidité, et par érosion (action mécanique du frottement provoqué par l’écoulement). Si leur formation reste identique dans les deux cas, la grotte s’inscrit dans un plan horizontal. On y accède de plain-pied, généralement sous une falaise. Les hommes préhistoriques ont  trouvé à s’y abriter et en ont décoré les  parois de peintures. On peut citer la  grotte de Lascaux, en Dordogne, ou  la  grotte Chauvet, en Ardèche. Le gouffre, lui, est souvent le résultat de  l’effondrement de la voûte d’une grotte sous l’effet d’une très forte érosion et/ou d’une dissolution de la roche calcaire. On y pénètre verticalement par une ouverture béante au niveau du sol. Un exemple en est le gouffre de Padirac (en photo), dans le Lot, qui comporte un orifice de 35  m de  diamètre par lequel on s’enfonce à 75  m de la surface pour aboutir à un réseau de  galeries où coule une rivière.

© Shutterstock

Question de Tiffany C., Paris XVIIe

TOUT COMPRENDRE | 83

FRENCH TECH

SON CV Fanie

Testa Genovese Fondatrice de Green Monsters

Green monsters,

2002

Bac ES à Lyon

2005

quand le végétal devient design

Prépa en arts appliqués et BTS en édition multimédia à Lyon ; en parallèle, elle commence à travailler dans une agence de communication

2008-2015

Fanie Testa Genovese avait une passion, les plantes, et une expertise, la communication sur internet. Elle a combiné les deux pour poursuivre son rêve : devenir « designer végétal », à son compte.

A

u Mob Hôtel de Lyon, des feuilles pointues semblables à des fl ammèches vertes et rouges tombent élégamment des poutres du plafond. Fanie Testa Genovese, 33 ans, qui a signé cette décoration inattendue, aime surprendre. Comme dans cette église où, à l’occasion d’un mariage, elle a remplacé les traditionnels petits bouquets en bout de banc par deux chemins de mousse, feuilles, branchages et bougies le long de l’allée centrale. Pour elle, chaque mise en scène raconte une histoire : celle d’un bâtiment, d’un projet d’entreprise ou d’un couple. Fanie a fondé, il y a deux ans à Lyon, Green Monsters, une 84 | TOUT COMPRENDRE

Consultante digitale pour des studios de création et des agences de communication à Paris et Lyon

2015-2016

Reconversion professionnelle (CAP fleuriste) et lancement de Green Monsters

Par Sophie Noucher

entreprise de design végétal : elle utilise les plantes pour créer des ambiances, et ses compétences en nouvelles technologies pour les vendre. La jeune artiste a en effet travaillé auparavant douze ans dans des agences de communication et sait développer un site internet, faire circuler ses créations sur les réseaux sociaux ou partager des conseils… Son expertise sert parfaitement son but : apporter de la nature dans des lieux qui en sont privés.

OXYGÈNE. Elle-même a souffert de cette absence dans les open spaces où elle a longtemps travaillé, ces grandes pièces sans cloisons où les bureaux sont les uns

à côté des autres et où tout le monde se voit. Ils sont souvent agrémentés d’un coin canapé ou même d’un babyfoot, mais de plantes, rarement, ou alors, dans les coins. Or, Fanie veut permettre à ses clients de s’oxygéner et

de quitter un moment l’univers virtuel des ordinateurs. Les cactus et autres plantes grasses qu’elle a installés dans les bureaux d’une agence de communication lyonnaise ont besoin de peu de soins. Mais s’occuper d’elles permet

Interview TC : Diriez-vous que vous avez inventé votre métier ? F.T.G. : Disons que je suis à la fois une fleuriste et une décoratrice qui utilise le matériau végétal. Ma spécificité, c’est que je cherche à permettre aux gens de retrouver la nature en ville, dans des espaces où elle n’est pas. Et où sa présence fait du bien. TC : Comment découvrez-vous les plantes rares ? F.T.G. : J’en trouve beaucoup dans les livres, sur des planches botaniques ! Je suis curieuse : je me tourne aussi vers les légumières ou les aromatiques. Je cherche chez les horticulteurs de ma région, et je commande également à des grossistes aux Pays-Bas. TC : En quoi vos expériences professionnelles passées vous ont-elles aidée à créer votre entreprise ? F.T.G. : Comme je m’y connais en graphisme et en communication digitale, j’ai gagné du temps. J’ai dessiné mon logo, créé mon site sur internet, et je sais aussi comment communiquer. J’ai commencé par donner des conseils sur un blog, j’utilise beaucoup Instagram car j’ai un métier visuel, et également Pinterest, où je propose des idées à piocher librement : comment décorer sa table, sa cage d’escalier…

aux salariés de « décompresser » quelques minutes et d’entrer dans une autre temporalité, celle d’« êtres vivants qui étaient sur Terre avant nous et nous survivront peut-être », selon les mots de la jeune femme.

GRAND-MÈRE. Pour se

lancer, il lui a fallu du cran, le secteur de la décoration florale des entreprises n’étant pas très développé. Elle a renoncé à un bon salaire pour reprendre ses études et s’inscrire à un CAP de fleuriste, notamment. Son projet n’étant pas « technologique » (avec fabrication d’un objet), elle n’a pas bénéficié des aides que reçoivent souvent les jeunes créateurs de start-up. Elle a

financé la création de Green Monsters avec les allocations de chômage qu’elle a touchées. Aujourd’hui, elle arrive à se verser un (petit) salaire et développe régulièrement de nouvelles activités. Elle a animé des ateliers créatifs aux Galeries Lafayette à Paris, refait la décoration d’un magasin Jennyfer pour Noël ou encore co-organisé des « brunchs sauvages » à Lyon avec « Octavie and the foodies », une chef spécialisée légumes et fruits : Octavie concoctait un repas 100 % vegan et Fanie imaginait le décor, tout en proposant un espace d’échange de boutures. En pensant fort à sa grandmère, qui lui a transmis la passion du végétal.

Internet m’a aussi aidée à me former : j’ai suivi des Mooc [des cours en ligne, NDLR] et regardé beaucoup de vidéos sur YouTube avant de faire mes propres explorations.

En chiffres

4 continents 6 lieux transformés

explorés par Fanie dans ses recherches de plantes rares

(tous sauf l’Antarctique !)

à Paris et à Lyon

Des milliers d’espèces travaillées

100 à 300 végétaux

achetés chaque mois

1

projet événementiel éphémère

organisé chaque mois

© Green Monsters

Tout Comprendre : D’où vient le nom de votre entreprise, Green Monsters ? Fanie Testa Genovese : C’est le nom d’une plante qu’on appelle aussi Monstera, une liane qui vient d’Amazonie, une battante qui se hisse jusqu’à la lumière. Elle sait s’adapter et je trouve son nom rigolo ! Elle était très présente dans les années 1970 dans les cours intérieures des grands immeubles ou dans les halls d’entrée. Elle est redevenue à la mode et je l’utilise régulièrement.

TOUT COMPRENDRE | 85

AGEND A

Sommaire

88 CINÉMA

Continuer

Alita : Battle Angel

La Favorite

92 BD / LIVRES

86 | TOUT COMPRENDRE

Super Smash Bros. Ultimate

90 JEUX VIDÉO Astro Bot : Rescue Mission

Face au

vent 17-11-18 31-03-19

#FaceAuVent

www.cap-sciences.net

/ HANGAR 20 - Quai de Bacalan - Bordeaux / 05 56 01 07 07

© Le Pacte / Kris Dewitte ; Twentieth Century Fox ; ADAGP, Paris, 2018 © Archives Marc et Ida Chagall, Paris

95 EXPOS / ÉVÉNEMENTS

TOUT COMPRENDRE | 87

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A G E N D A Cinéma

ALITA : BATTLE ANGEL verdict

Film non présenté à la presse mensuelle avant sa sortie

Ce film est à voir parce que… même s’il est réalisé par Robert Rodriguez, le projet est entièrement et fidèlement celui de James Cameron. Envisagée depuis 2003, l’adaptation en film du manga Gunnm par le réalisateur d’Aliens, Terminator, Titanic et Avatar est devenue au fil des années une sorte d’Arlésienne cinématographique mythique auquel plus personne ne croyait. Jusqu’à cette rencontre fructueuse et un peu inattendue entre Robert Rodriguez et James Cameron. Réalisateur indépendant de films de genre, parfois même de série B (Machete Kills, Sin City), Robert Rodriguez s’est donc totalement mis au service du projet de James Cameron suroccupé par la réalisation de ses quatre prochains films Avatar – oui, quatre ! Entre folies technologiques cyberpunks et émotions à hauteur humaine, les

premières images d’Alita : Battle Angel donnent beaucoup d’espoir. Pour raconter l’histoire d’une très jeune femme cyborg amnésique qui prend progressivement conscience d’elle-même, le film utilise les technologies de « performance capture » d’Avatar pour mélanger créatures de synthèse et images réelles. Dans un futur évidemment post-apocalyptique où humains et cyborgs aux pouvoirs surhumains coexistent, Alita va chercher à découvrir ses origines tout en luttant contre des assaillants dont elle ignore tout. Le film et son sujet se présentent déjà comme un pur exercice à la James Cameron où la forme et le fond fusionnent : images de synthèse plus vraies que nature et êtres synthétiques en quête de vérité. Rendez-vous incontournable, en 3D, pour prendre le pouls cinématographique du futur de l’humanité et de la technologie.

De Robert Rodriguez, avec Rosa Salazar, Christoph Waltz, Jennifer Connelly… Au cinéma le 13 février.

SORRY TO BOTHER YOU

verdict

Ce film est à voir parce que… cette curieuse et grinçante satire du monde du travail déborde largement le cadre du déjà-vu. Quitte à prendre des risques avec un scénario bancal. Catapulté vendeur vedette presque malgré lui dans une entreprise de télémarketing, un jeune homme noir

d’Oakland, en Californie, côtoie le charismatique grand patron blanc qui tente de le faire participer à un plan d’enrichissement saugrenu. La comédie sociale déjà burlesque et surréaliste entraîne alors le film vers un fantastique cauchemardesque.

De Boots Riley, avec Lakeith Stanfield, Tessa Thompson, Jermaine Fowler… Au cinéma le 30 janvier.

88 | TOUT COMPRENDRE

Par François Bliss de la Boissière

LA FAVORITE verdict Ce film est à voir parce que… très vite après le sourire sceptique en voyant Virginie Efira traverser à cheval tout un film et une bonne partie des paysages désertiques et montagneux du Kirghizistan, l’intensité de son jeu et de la situation rend l’affaire tout à fait sérieuse. Bonne actrice reconnue, y compris quand elle parle russe dans ce rôle, et désormais cavalière respectable, Virginie Efira convainc encore une fois en entreprenant, avec son fils de 20 ans, une sorte de voyage initiatique au milieu d’un paysage de bout du monde. Le fils, mutique et fâché jusqu’à la rage d’être là, écoute de la musique techno avec son iPod comme si les magnifiques paysages rocailleux de ce pays frontalier avec la Chine ne le touchaient pas. Sa mère, désespérée par tant de haine à peine contenue et d’indifférence au monde primal qui l’entoure, essaie pourtant de nouer ou renouer le contact avec lui. De chevauchées à travers des déserts en bivouacs nocturnes au milieu de rien, jusqu’aux rencontres avec des villageois ou des nomades plus ou moins bien intentionnés, leur périple sans concession qui donne son titre au film, est évidemment une tentative de réconciliation entre deux êtres. En allant à la rencontre d’une nature aussi brute, la mère, divorcée, espère déclencher pour elle-même et son fils une remise à zéro affective, spirituelle et physique. Aride et sec comme son paysage, le film atteint presque son but. De Joachim Lafosse, avec Virginie Efira, Kacey Mottet Klein… Au cinéma le 23 janvier.

Ce film est à voir parce que… la reconstitution historique minutieuse et hystérique d’une cour d’Angleterre du xviiie siècle enfarinée autour de sa reine malade, capricieuse, odieuse même, révulse et fascine tout autant. Le film, aussi dérangé que ses personnages décadents et arrivistes, abuse des grands-angles pour raconter l’histoire d’une servante séduisant tout le monde jusqu’à devenir la favorite d’une reine caractérielle à moitié folle. Le tout sur fond de guerre avec la France. Les âmes les plus sensibles s’abstiendront devant un festival de crudités et de comportements humains abjects. De Yórgos Lánthimos, avec Emma Stone, Olivia Colman, Rachel Weisz… Au cinéma le 6 février.

© Twentieth Century Fox ; Universal Pictures ; Le Pacte / Kris Dewitte ; Twentieth Century Fox

CONTINUER

verdict

TOUT COMPRENDRE | 89

A G E N D A Jeux vidéo

VR ASTRO BOT

RESCUE MISSION verdict

Le casque PlayStation VR sur la tête, absorbé en VR (réalité virtuelle) dans un monde à tendance surréaliste plein de couleurs claquantes et de matières douillettes, le joueur dirige avec le frisson d’un plaisir inédit un adorable Astro Bot dans un jeu de plateforme en 3D presque vintage. À l’ancienne, parce qu’il décline toute la panoplie bien connue du jeu de plate-forme 3D initié par le séisme Super Mario 64 en 1996. Inédit, parce qu’en VR, tout effet est démultiplié, et ici joyeusement subjuguant. La présence tangible du petit Astro Bot qui vous salue de la main, sauve d’un coup de savate (aux fesses ?) ses congénères perdus dans les décors, avant de venir se blottir à l’intérieur de votre manette de jeu vibrante, lumineuse et visible dans l’écran, ne laissera personne indifférent. Du joueur débutant au joueur chevronné, la collection de mondes à visiter offre de quoi s’occuper et se réjouir. Les malicieux magiciens de l’équipe Japan Studio de Sony (LocoRoco, Patapon, Gravity Rush…) s’amusent beaucoup à titiller le joueur de nombreuses trouvailles graphiques et spatiales. Jamais un jeu en VR pratiqué assis n’aura obligé à autant se contorsionner sur son canapé, par exemple. L’action se passe parfois dans le dos du joueur quand il faut chercher des pièces jaunes cachées, peut-être, dans un recoin d’une grotte, derrière une cascade d’eau. Ou au-dessus du joueur quand Astro Bot fait le funambule sur les poutres d’un chantier de construction ou au-dessus du vide d’un canyon rocheux. Après Lucky’s Tale (voir Tout Comprendre n° 90) et Moss (TC n° 95), un des must tout public des jeux en réalité virtuelle. 90 | TOUT COMPRENDRE

• Support : casque PlayStation VR sur PS4 • Genre : plate-forme 3D • Jouable à la manette DualShock 4 • VR : très confortable • 1 joueur • PEGI* : à partir de 7 ans • Sony Interactive Entertainment, 40 € (démo gratuite téléchargeable)

de jeux

POKÉMON LET’S GO

PIKACHU OU ÉVOLI verdict

SUPER SMASH BROS.

ULTIMATE

verdict Depuis ses débuts en 1999, la série Super Smash Bros. a la vertu contradictoire d’entraîner tous les fans Nintendo d’hier et d’aujourd’hui à se combattre entre eux avec tous les personnages de l’univers Nintendo d’hier et d’aujourd’hui. La réunification et l’intégration de tous les publics par des combats en mêlées, il fallait oser. Le principe improbable est encore plus vrai avec ce nouvel épisode mâtiné de jeu de rôle sur Switch, attendu dans le monde du jeu vidéo comme un rendez-vous olympique mondialisé. Aux côtés des innombrables personnages Nintendo (Kirby en vedette, Mario, Yoshi, Pikachu… 8 au départ, 76 en tout, dont 60 à débloquer en jouant), des plus connus aux plus obscurs, conviés à s’affronter dans plus de 100 arènes elles aussi tirées des mondes Nintendo, cette édition Ultimate invite aussi des héros célèbres venant d’autres univers et créateurs.

La castagne brouillonne entre deux à huit personnages à l’écran où les coups pleuvent au milieu d’un capharnaüm de micro-explosions, vire au pugilat dantesque et insensé. Bien sûr, ce brassage foutraque est ce qui réjouit. Dans tous les cas, pour certains d’entre nous tatillons et défenseurs d’une galanterie d’un autre âge, utiliser Link pour batailler, taper et bousculer, épée en mains, sa bien-aimée princesse Zelda (qui rend bien les coups) est une hérésie dont on reste inconsolable. Un jeu Panthéon, énervéénervant et sans doute incontournable. • Support : Switch • Genre : jeu de combat • 1 à 8 joueurs en local • 1 à 4 joueurs en ligne (nécessite l’abonnement Nintendo Switch Online) • Compatible manette GameCube avec adaptateur • PEGI* : à partir de 12 ans • Nintendo, 70 €

Pour ceux qui suivent la foisonnante généalogie Pokémon, cette aventure redessinée en 3D sur Switch reprend les éléments du jeu Pokémon Jaune sorti en 2000 en Europe et renoue avec la première génération de Pokémon. Comme depuis vingt ans, le dresseur de Pokémon traverse villages et campagnes pour attraper et collectionner les sympathiques bestioles dans des face-à-face très ritualisés en jetant une Poké Ball à leur tête*. Cette réédition de luxe surfe, bien sûr, sur le jeu mobile Pokémon Go qui a fait courir toute la planète dans la rue, son smartphone à la main. Destiné aux nostalgiques et aux enfants. • Support : Switch • Genre : jeu de rôle • 1 à 2 joueurs • PEGI* : à partir de 7 ans • Nintendo, 65 € (* pack incluant la manette Poké Ball lumineuse avec vibration et haut-parleur : 110 €)

TETRIS EFFECT verdict

Bien avant Candy Crush, Tetris était (depuis 1984) le jeu passe-temps hypnotique favori. L’empilage chronométré de briques est même devenu depuis un jeu d’exploit et de performance. L’artiste culte japonais Tetsuya Mizuguchi (Lumines, REZ…) s’est amusé à revisiter le célèbre jeu en lui ajoutant des environnements graphiques psychédéliques. L’exercice basique reste le même et demande, malgré plusieurs options d’accessibilité, de la patience et une maîtrise très avancée. Purement esthétique et graphiquement inégale, l’option réalité virtuelle avec le casque PlayStation VR n’adoucit pas un jeu devenu vraiment hardcore. • Support : PlayStation 4 et PS VR • Genre : puzzle-game • VR optionnelle • 1 joueur • PEGI* : tout public • Enhance Inc., 20 €

Par François Bliss de la Boissière

* PEGI, norme de classification des jeux par âge : www.pegi.info

TOUT COMPRENDRE | 91

A G E N D A BD/Livres

Essai illustré

L’ANXIÉTÉ, QUELLE CHOSE ÉTRANGE LA DOULEUR, QUELLE CHOSE ÉTRANGE

DE STEVE HAINES (TEXTE) ET SOPHIE STANDING (DESSIN)

Attardons-nous sur les élégants ouvrages de Ça et Là, un éditeur indépendant et exigeant. À moins d’être un peu tordu, personne n’aime avoir mal ou être anxieux (ou subir un trauma, sujet d’un troisième volume à paraître). Reste qu’une fois ce constat posé, on aimerait en savoir un peu plus. C’est là qu’interviennent Steve Haines et Sophie Standing. Le premier est chiropracteur et adepte des médecines douces ; la seconde, illustratrice, travaille notamment pour la Royal Opera House (Londres). Dans un langage clair et accessible, servi par un graphisme inventif et poétique, et complété d’abondantes notes de bas de page ainsi que d’une bibliographie (en langue anglaise), les deux Britanniques nous en expliquent les mécanismes, croisant, avec beaucoup de pédagogie, des notions de biologie, de neurosciences, de physiologie et de psychologie. Éd. Ça et Là, 32 pages (par volume), 12 €. Récit

L’INCROYABLE HISTOIRE DE LA MÉDECINE

DE JEAN-NOËL FABIANI (TEXTE) ET PHILIPPE BERCOVICI (DESSIN)

Une évidence saute aux yeux à la lecture de cette Incroyable Histoire de la médecine : il vaut mieux se faire soigner aujourd’hui qu’au paléolithique ! Jean-Noël Fabiani, chirurgien cardio-vasculaire à l’hôpital européen GeorgesPompidou, à Paris, s’attelle à nous faire mieux comprendre le corps humain tout en retraçant les grandes épidémies et la façon dont elles furent éradiquées, la découverte des principaux instruments et de l’anesthésie, sans oublier les avancées actuelles de la biologie et de la génétique. Tout cela aurait pu paraître barbant (saviez-vous d’ailleurs que les barbiers, justement, pratiquèrent les premiers actes chirurgicaux ?) sans le concours du dessinateur Philippe Bercovici, à qui l’on doit déjà la rigolote série des Femmes en blanc. Au final, on parcourt un récit rigoureux, ludique et drôle, qui mériterait presque d’être remboursé par la Sécu. Éd. Les Arènes BD, 240 pages, 22,90 €.

92 | TOUT COMPRENDRE

Enquête

L’ARGENT FOU DE LA FRANÇAFRIQUE,

L’AFFAIRE DES BIENS MAL ACQUIS

DE XAVIER HAREL (TEXTE) ET JULIEN SOLÉ (DESSIN) Pour bien comprendre les ressorts de ce qu’on nommera l’affaire des biens mal acquis, entendez par là l’incroyable fortune accumulée par plusieurs chefs d’État africains et leurs proches, avec la complicité de l’État français, il faut revenir aux accords secrets signés entre notre pays et ses anciennes colonies subsahariennes au seuil des années 1960. En échange de quelques petits arrangements en famille (que l’on nommera pudiquement la Françafrique), se met en place un vaste système de corruption et d’affairisme qui bénéficiera à des despotes peu éclairés, au détriment bien entendu des populations locales, et à pas mal de politiciens français. Le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFDTerre Solidaire), à l’origine du rapport « Biens mal acquis, à qui profite le crime ? », apporte sa caution morale à ce reportage en images, entamé naguère dans La Revue dessinée. Éd. Glénat, 96 pages, 17,50 €.

Documentaire illustré

LE GRAND LIVRE DU PARFUM,

POUR UNE CULTURE OLFACTIVE

DU COLLECTIF NEZ (DIRECTION : JEANNE DORÉ), ILLUSTRÉ PAR JÉRÉMY PERRODEAU L’odeur, l’une des principales empreintes humaines, vient pour la plupart des gens d’un parfum. Nous avons à vie en mémoire celui de nos proches. Il est aussi science, art, industrie, marché. Ce sujet universel est traité dans ce livre sous toutes ces facettes : histoire depuis l’Antiquité, matières premières, processus de fabrication, parfumeurs… Vous trouverez aussi des réponses à des questions pratiques telles que « Comment se parfumer ? » ou « Pourquoi les parfums s’altèrent sur la peau ? ». Le cachet des illustrations ajoute au pouvoir de séduction de cette bible de la parfumerie. Éd. Nez culture, Le Contrepoint, 208 pages, 29 €.

Chronologie illustrée

LA BELLE AVENTURE DE L’OCÉAN

Mémo

CULTURE GÉNÉRALE,

MON LIVRE DE RÉFÉRENCE

COLLECTIF, SOUS LA DIRECTION DE JEAN-MARIE NICOLLE

S’il avait été un livre de culture générale classique, survolant les connaissances de base sur la géographie, l’histoire, la philosophie, les religions, les beaux-arts… sans doute ne l’aurions-nous pas sélectionné. Pas question pour ce recueil de fiches sur papier glacé, aux zooms colorés et aux régulières reproductions d’œuvres d’art, de dispenser du savoir bateau au kilo. L’objectif est l’approfondissement des connaissances en regardant avec une loupe des sujets très vastes. Comme par exemple : « L’épopée : les dieux parmi les hommes », « Sciences et guerres mondiales », « Le design », « Les droits de l’homme sont-ils de naissance ? »… Chaque développement est accompagné d’encadrés interrogeant l’étymologie, offrant des extraits littéraires et des détails biographiques, précisant le lexique, replaçant les événements dans un contexte… autant d’éléments d’ouverture. S’être détourné du classique classement thématique au profit de la chronologie donne l’impression de vraiment brasser la culture. Éd. Vuibert, 544 pages, 25 €.

Digest

ZAPPING DES SÉRIES

DE MÉLANIE BOISSONNEAU, BENJAMIN CAMPION, ANGELO CRIPPA ET QUENTIN MAZEL

DE PIERRE ROYER ET JEAN-BAPTISTE DE PANAFIEU

Notre planète est dite bleue parce que sa surface est à 71 % recouverte d’eau. Des origines de l’océan à l’année 2018 où le tourisme de masse a trouvé dans le paquebot Symphony of the Seas le plus titanesque moyen de prendre la mer, le livre vogue. Son rythme de croisière : une superbe photo par entrée. Ses ondulations : piocher dans des thèmes multiples. En conservant l’ordre chronologique comme fil directeur, l’océan est abordé du point de vue géologique, biologique, historique, commercial, sportif, technique, juridique, environnemental… Une belle aventure de lecture et de culture que cet ouvrage.

Il est rare de trouver un livre consacré aux séries si enthousiasmant. Les dictionnaires courants ennuient les addicts (préférant regarder une série que lire une fiche technique avec un résumé) et ne parviennent pas à entraîner les néophytes. Là, en toute liberté, on picore. Cela ne signifie pas que toute structuration a été abandonnée. On s’y retrouve dans de grandes catégories : genres, personnages, créateurs, public visé… Mentions spéciales pour les répliques cultes et les nombreuses photos. Ne zappez pas !

Éd. Dunod, 216 pages, 29 €.

Éd. Larousse, 320 pages, 19,95 €.

Roman

TROIE

DE DAVID ET STELLA GEMMELL Cette édition collector, reliée cuir et illustrée par l’artiste BD Thimothée Montaigne, réunit le cycle troyen de l’auteur anglais, soit trois romans : Le Seigneur de l’Arc d’Argent, Le Bouclier du Tonnerre, La Chute des Rois. Le nom de Stella est crédité, car elle a achevé l’œuvre au décès brutal de son mari. L’épisode le plus connu de la mythologie grecque, la guerre de Troie, fait intervenir

Par Patrick Gaumer (BD) et Delphine Gaston-Sloan (livres)

des héros, des batailles épiques, des amours compliquées, des trahisons internes, des interventions divines, des nœuds familiaux… le sel fictionnel en un mot. Lisez ce que ça donne quand un maître de l’heroic fantasy s’y aventure ! Gemmell puise dans la légende pour mieux la façonner à son idée. Riche, fluide, captivant. Regrettons juste quelques travers machos. Éd. Bragelonne, 1 224 pages, 50 €.

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A G E N D A EXPOS/ÉVÉNEMENTS

Par Michelle Foucart-Orsel

de Sorties

ÇA SOUFFLE SUR BORDEAUX !

Comment se forme le vent ? Avec quels appareils au le mesure-t-on ? 17-11-18 31-03-19 Peut-on le prévoir ? Ce phénomène météorologique qui fait tourner les moulins et avancer les bateaux à voile depuis des siècles fut, avec l’eau, la première source d’énergie utilisée par l’homme. Et il est loin d’être remisé aux oubliettes ! Aujourd’hui, le vent est toujours aussi précieux pour faire fonctionner les éoliennes, ventiler, aérer, sécher… Cette exposition aborde les multiples facettes du vent suivant un parcours où le visiteur peut écouter, regarder, lire, manipuler… pour mieux comprendre celui qui nous apporte la pluie autant qu’il chasse les nuages.

Face

vent #FaceAuVent

www.cap-sciences.net

Les satellites qui sillonnent l’espace pour surveiller notre fragile planète bleue et les changements induits par nos activités (lire aussi pp. 54-61) se révèlent être de talentueux photographes qui nous envoient de remarquables images de la Terre

vue du ciel. La Bretagne illuminée de nuit, le désert du Sahara (photo), le delta de fleuves australiens et d’autres photos d’exception sont à découvrir dans cette exposition coproduite par l’Agence spatiale européenne et le CNES.

« La Terre vue de l’espace », au Planétarium de Vaulx-en-Velin (Rhône), jusqu’au 11 août. Tarifs : de 6 € à 10 €. Plus d’infos sur : www.planetariumvv.com

LE BLANC, LE NOIR ET LA COULEUR Marc Chagall, né russe, naturalisé français, est l’un des peintres majeurs du xxe siècle. Consacré « maître de la couleur », il est aussi l’auteur d’œuvres remarquables en noir et blanc, notamment des gravures, dessins, lavis… Car avec plus de 1 000 œuvres produites, l’artiste a créé – et excellé – dans de nombreuses techniques d’art plastique. Cette exposition en présente une vaste sélection : peintures, sculptures, collages, dessins à l’encre de Chine, céramiques… tous empreints du style poétique très reconnaissable de l’artiste. « Chagall, du noir et blanc à la couleur » à l’Hôtel de Caumont (Aix-en-Provence), jusqu’au 24 mars. Tarifs : de 9,50 € à 14 €. Plus d’infos sur : www.caumont-centredart.com

« Face au vent », au Cap Sciences de Bordeaux, jusqu’au 31 mars. Tarifs : de 3,50 € à 5,50 €. Plus d’infos sur : www.cap-sciences.net

STAR WARS VU PAR SON PLUS GRAND FAN

« Les fans contreattaquent », c’est l’histoire de Daniel Prada, un Espagnol qui, depuis l’âge de 8 ans, collectionne des objets de toutes sortes se rapportant à la célèbre saga intergalactique. Il décide de se consacrer pleinement à sa passion à partir de 2009. Dix ans plus tard, il se retrouve à la tête d’une collection impressionnante de 600 objets, qu’il a tout d’abord exposée dans sa ville, Madrid, puis à Barcelone, Pampelune, Grenade, Alicante… Sacrée « Meilleure Exposition Star Wars » en 2017 par les internautes, elle a conquis Paris, où elle siège jusqu’à fin mars. La plus grande collection privée d’Europe comporte des pièces uniques, telles que des costumes originaux, des figurines grandeur nature (un Jabba le Hutt de 5 m !), des sculptures articulées, le pont de commandement de l’Étoile de la mort… Fascinés, vous serez ! « Les fans contre-attaquent », au Centre Expo Lafayette Drouot (Paris), jusqu’à fin mars. Tarifs : de 11,50 € à 18 € selon la formule choisie. Plus d’infos sur : www.centre-expo-lafayette-drouot.com

TOUT COMPRENDRE | 95

© KARI-ESA/JAXA-ESA ; ADAGP, Paris, 2018 © Archives Marc et Ida Chagall, Paris ; Culturespaces / S. Lloyd_15

LA TERRE DANS L’ŒIL DES SATELLITES

/ HANGAR 20 - Quai de Bacalan - Bordeaux / 05 56 01 07 07

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Après la lecture de votre magazine, saurez-vous démêler le vrai du faux ?

4. Einstein a établi que la lumière ne déviait pas de sa route, même en présence d’une forte attraction gravitationnelle. r Vrai r Faux 5. La vitamine C est essentielle pour que le corps synthétise du collagène. r Vrai r Faux 6. Les premiers travaux réalisés sur l’ADN datent du XIXe siècle. r Vrai r Faux

17. Le scanner utilise les rayons X. r Vrai r Faux

10. On a déjà vu des grêlons géants atteindre 2 kg. r Vrai r Faux

18. La tour de Londres désigne l’une des tours du pont mobile de la capitale anglaise. r Vrai r Faux

11. Une pluie verglaçante se produit quand il pleut en dessous de 0 °C. r Vrai r Faux

19. Certains détenus de la tour de Londres y étaient admis avec leur famille. r Vrai r Faux

12. Des satellites peuvent observer la migration des animaux. r Vrai r Faux

20. Jeannette Guyot fut capturée par les nazis et mourut en déportation. r Vrai r Faux 5/ Vrai 6/ Vrai

SOLUTIONS

7/ Faux 8/ Vrai

9/ Vrai 10/ Vrai

11/ Faux 12/ Vrai

13/ Faux 14/ Vrai

3. Le boson de Higgs est une particule subatomique. r Vrai r Faux

16. Un tunnel de 21 km a été creusé sous la ville de Londres pour créer une nouvelle ligne ferroviaire. r Vrai r Faux

3/ Vrai 4/ Faux

2. La pénicilline a été découverte après de nombreuses recherches. r Vrai r Faux

14. Il est possible de se rendre compte de la santé des océans en observant leur couleur. r Vrai r Faux

TOUT COMPRENDRE | 97

© Adrian Smith & Gordon Gill architecture ; Fair Dealing

8. Il est possible de déceler nos origines génétiques dans un peu de salive. r Vrai r Faux

1. Dans le vide, une bille de plomb et une plume tombent à la même vitesse. r Vrai r Faux

13. Le trou dans la couche d’ozone s’est encore agrandi en 2018. r Vrai r Faux

15. La tour Jeddah fera 1 500 m de hauteur. r Vrai r Faux

7. L’ADN comporte normalement 21 paires de chromosomes. r Vrai r Faux

9. Aucun flocon n’a la même forme qu’un autre. r Vrai r Faux

Par Michelle Foucart-Orsel

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